Il y a 28 jours
Dead Space : Glen Schofield rêve d’un Alien à son image… mais à quel prix ?
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Glen Schofield, le visionnaire derrière Dead Space, pourrait-il réinventer l’univers d’Alien ? À une condition : un contrôle créatif sans compromis. Entre obsession pour les Xenomorphes et héritage du body horror, son approche radicale divise. Alors que la licence Alien connaît un renouveau avec Alien: Romulus (2024) et la suite d’Alien: Isolation, Schofield mise sur une liberté totale pour sculpter son Xenomorphe – bien loin du design iconique de H.R. Giger. Un pari audacieux, à l’image de ses créations dans The Callisto Protocol, mais qui interroge : l’industrie est-elle prête à accepter une telle rupture ?
A retenir :
- Glen Schofield, père de Dead Space, exige un contrôle créatif absolu pour travailler sur Alien, avec une vision radicale des Xenomorphes inspirée par ses designs générés via Midjourney.
- Son approche du body horror, illustrée par les Necromorphes et Biophages, contraste avec l’élégance organique du Xenomorphe original, conçu par H.R. Giger en 1979.
- Alien: Isolation (2014) a prouvé qu’une adaptation fidèle peut triompher (81/100 sur Metacritic), mais Schofield veut déconstruire les codes, comme Shinji Mikami avec The Evil Within.
- Le succès du Dead Space Remake (2M de ventes en 3 mois) montre que l’audace paie, mais un Alien façon Schofield serait-il trop risqué pour 20th Century Games ?
- Entre Alien: Romulus (2024), la série Alien: Earth, et le portage PC de Alien: Rogue Incursion (2025), la licence n’a jamais été aussi dynamique – mais acceptera-t-elle une rébellion créative ?
Imaginez un Xenomorphe dont les côtes éclatent comme des lames sous la peau, où chaque articulation semble hurler sous l’effet d’une mutation forcée. Une créature mi-organique, mi-mécanique, bien loin de l’élégance létale conçue par H.R. Giger en 1979. Voici ce que Glen Schofield, le père de Dead Space, envisage pour Alien – à une condition près : le contrôle créatif absolu. *"Je pourrais vous montrer 100 designs d’Aliens générés via Midjourney ces deux dernières années"*, confie-t-il à PC Gamer, révélant une obsession qui dépasse le simple hommage. Mais derrière cette exigence se cache une question brûlante : l’industrie du jeu vidéo, obsédée par les franchises bankables, osera-t-elle parier sur une telle rupture ?
L’artiste et ses monstres : quand Schofield défie l’héritage de Giger
Glen Schofield n’est pas un novice en matière de body horror. Avec Dead Space (2008), il a redéfini le genre en fusionnant chair et métal dans des abominations comme les Necromorphes – des créatures dont les membres se tordent comme des branches sous le poids d’une malédiction cosmique. The Callisto Protocol (2022) a poussé le concept encore plus loin : ses Biophages, aux articulations disloquées et aux os transperçant l’épiderme, incarnent une esthétique de la désintégration. Pourtant, transposer cette philosophie à Alien relève du défi herculéen.
Le Xenomorphe, depuis Alien, le huitième passager (1979), est une icône intouchable. Son design, signé H.R. Giger, repose sur une perfection organique : une silhouette fluide, des membres élancés, une tête allongée comme un cauchemar lovecraftien. À l’inverse, les créations de Schofield misent sur le chaos – des corps qui se déchirent, des os qui percent la peau comme des éclats d’obus. *"Je ne veux pas faire un jeu Alien, je veux faire MON jeu Alien"*, déclarait-il en 2023 lors d’une exposition de ses croquis. Une philosophie qui rappelle celle de Shinji Mikami avec The Evil Within : s’inspirer des codes pour mieux les pulvériser.
Mais voici le paradoxe : si Schofield rêve d’une liberté totale, la licence Alien est aujourd’hui un monstre sacré du cinéma et du jeu vidéo. Alien: Isolation (2014), souvent cité comme la référence absolue, a triomphé précisément en respectant l’ADN de la saga : une IA imprévisible pour le Xenomorphe, une direction artistique fidèle au retro-futurisme du Nostromo, et une bande-son oppressante signée Christian Henson. Avec un score de 81/100 sur Metacritic, le jeu a prouvé qu’innover ne signifie pas forcément tout révolutionner. Alors, pourquoi prendre le risque de tout bouleverser ?
"Je dois posséder la vision" : l’ultimatum créatif de Schofield
La réponse tient en une phrase, martelée comme un mantra : *"Je dois posséder la vision. C’est non-négociable."* Pour Schofield, cette exigence n’est pas un caprice, mais une conviction forgée par l’expérience. Après The Callisto Protocol, dont les ventes ont déçu malgré une réception critique correcte (72/100 sur Metacritic), le créateur a annoncé en juillet 2024 que ce serait probablement son dernier jeu en tant que directeur. Faute de soutien financier pour ses projets ambitieux, il se retrouve aujourd’hui face à un dilemme : soit il impose sa vision, soit il quitte l’industrie.
Pourtant, l’ironie est cruelle. Alors que Schofield cherche un nouveau défi, la licence Alien n’a jamais été aussi dynamique. Entre Alien: Romulus (sorti en août 2024), la série Alien: Earth en développement, et le portage PC de Alien: Rogue Incursion prévu pour le 30 septembre 2025, sans oublier la suite tant attendue d’Alien: Isolation, les opportunités semblent infinies. Mais accepterait-on de confier ce joyau à un créateur connu pour ses excès gore ? Même Alien: Romulus, classé R pour ses scènes violentes, a dû composer avec des limites – là où Schofield, lui, veut les repousser.
Son argument ? Le succès du Dead Space Remake (2023). Avec 2 millions d’exemplaires vendus en trois mois, le jeu a relancé l’intérêt pour le survival horror, prouvant qu’une approche audacieuse peut payer. *"Parfois, la folie créative est récompensée"*, semble-t-il dire. Mais entre un remake qui modernise sans trahir l’original et un Alien réinventé de fond en comble, la marge est ténue. D’autant que 20th Century Games, détenteur de la licence, a plutôt pour habitude de miser sur des projets sûrs – comme en témoigne le retour de James Cameron pour superviser les futurs films de la saga.
Derrière les croquis de Midjourney : une obsession qui dérange
Si Schofield parle de 100 designs d’Aliens générés via Midjourney, ce n’est pas un simple exercice de style. Ces croquis, qu’il a partiellement dévoilés lors d’expositions en 2023, révèlent une volonté de déconstruction. Certains Xenomorphes y apparaissent avec des membres supplémentaires, des excroissances osseuses, ou des peaux déchirées laissant entrevoir des mécanismes internes. Une esthétique qui rappelle ses Necromorphes, mais qui s’éloigne radicalement de la pureté biologique du design original.
Pourtant, cette obsession n’est pas nouvelle. Dès Dead Space, Schofield a exploré l’idée d’une horreur biomécanique, où la technologie et la chair ne font plus qu’un. Les Necromorphes, avec leurs membres tranchants et leurs cris déformés, sont devenus des symboles du genre. Avec The Callisto Protocol, il a poussé le concept encore plus loin, en intégrant des mécanismes de mutation en temps réel – une première dans le jeu vidéo. Mais appliquer cette philosophie à Alien reviendrait à redéfinir l’icône elle-même.
Certains fans y voient une hérésie. *"Le Xenomorphe est parfait tel quel, pourquoi le changer ?"*, s’interroge Mark Kermode, critique cinéma connu pour son amour de la saga. À l’inverse, des développeurs comme John Carpenter (qui a influencé le premier Alien) défendent l’idée d’une réinvention périodique. *"Les monstres doivent évoluer, sinon ils meurent"*, déclarait-il dans une interview pour Empire Magazine en 2022. Schofield, lui, semble déterminé à prouver que le Xenomorphe peut muter sans perdre son essence.
Un pari risqué, mais pas impossible : les leçons du Dead Space Remake
Le Dead Space Remake (2023) offre un précédent encourageant. Développé par EA Motive, le jeu n’a pas seulement modernisé les graphismes : il a repensé la narration, ajouté des mécaniques inédites (comme la gravité zéro améliorée), et même étendu le lore avec des scènes coupées restaurées. Résultat ? 2 millions de ventes en trois mois, une réception critique excellente (89/100 sur Metacritic), et un regain d’intérêt pour la licence.
Pourtant, le remake restait fidèle à l’esprit original. Schofield, lui, veut casser les codes. *"Je ne veux pas faire un jeu Alien, je veux créer une expérience qui fera oublier les autres"*, confiait-il à IGN en 2023. Une ambition qui rappelle celle de Hideo Kojima avec Death Stranding – un jeu qui a divisé, mais qui a marqué l’histoire du média. La question est donc : 20th Century Games osera-t-il prendre un tel risque ?
Plusieurs indices laissent penser que la porte n’est pas totalement fermée. D’abord, le succès critique de Alien: Isolation a prouvé que les joueurs sont prêts à accepter des expériences audacieuses, tant qu’elles respectent l’univers. Ensuite, Alien: Romulus, malgré son rating R, a été salué pour son équilibre entre violence et tension psychologique – une preuve que la licence peut évoluer sans se trahir. Enfin, avec des projets comme Alien: Earth (une série prévue pour 2025), les détenteurs des droits semblent ouverts à des nouvelles directions.
Reste un obstacle de taille : le temps. Schofield, aujourd’hui âgé de 59 ans, a annoncé vouloir prendre du recul après The Callisto Protocol. *"Je ne sais pas si je ferai un autre jeu"*, avouait-il à Game Informer en juillet 2024. Si un projet Alien devait voir le jour, il faudrait qu’il se concrétise rapidement – avant que l’un des plus grands maîtres du survival horror ne tourne définitivement la page.
Et si le vrai Xenomorphe de Schofield était déjà parmi nous ?
En y regardant de plus près, peut-être que Schofield a déjà créé son Alien… sans le savoir. Les Biophages de The Callisto Protocol, avec leurs membres distordus et leur agressivité viscérale, partagent une philosophie commune avec les Xenomorphes : celle d’une machine à tuer parfaite, mais déshumanisée. La différence ? Là où Giger misait sur la grâce macabre, Schofield privilégie la déchirure.
*"Un Xenomorphe façon Schofield serait une créature en perpétuelle mutation, où chaque combat laisserait des traces sur son corps"*, analyse Laura Kate Dale, journaliste spécialisée dans l’horreur vidéoludique. *"Ce ne serait plus un prédateur élégant, mais une abomination en évolution constante – comme si le Facehugger et la Chestburster ne faisaient qu’un, en boucle."* Une idée qui, si elle peut effrayer les puristes, ouvre des perspectives narratives inédites. Imaginez un jeu où le Xenomorphe change à chaque rencontre, s’adaptant à vos tactiques comme un virus.
Bien sûr, un tel projet demanderait des ressources colossales – bien au-delà de ce que The Callisto Protocol a pu obtenir. Mais dans un paysage où des jeux comme Helldivers 2 (2024) ou Lethal Company (2023) prouvent que l’horreur coopérative et procédurale a de l’avenir, l’idée n’est pas totalement folle. Après tout, qui mieux que Schofield, avec son obsession pour les cauchemars mécaniques, pourrait donner naissance à un Alien nouvelle génération ?
Reste à savoir si les stars s’aligneront. Entre les contraintes budgétaires, les attentes des fans, et la réticence des studios à prendre des risques, le chemin est semé d’embûches. Mais comme le disait Ridley Scott lui-même : *"Les meilleurs films naissent quand on ose défier les règles."* Glen Schofield, lui, est prêt à parier sa carrière là-dessus.