Actualité

Need for Speed à l’abandon : quand EA sacrifie une légende des jeux de course
Actualité

Il y a 32 jours

Need for Speed à l’abandon : quand EA sacrifie une légende des jeux de course

Pourquoi Need for Speed, jadis reine des jeux de course, est-elle en train de disparaître ?

Le virage brutal de Criterion Games – désormais 100% dédié à Battlefield 6 – scelle le sort d’une franchise mythique. Entre l’arrêt prématuré des mises à jour pour Need for Speed Unbound (2022), la fermeture de Speedhunters (la vitrine culturelle d’EA pour l’automobile), et l’extinction programmée des serveurs de Rivals en 2025, les signes s’accumulent : Electronic Arts a tourné la page. Pendant ce temps, Gran Turismo et Forza Horizon dominent le marché avec des investissements colossaux. Décryptage d’un déclin annoncé, entre choix stratégiques discutables et fans laissés sur le bas-côté.

A retenir :

  • Criterion Games abandonne les jeux de course pour devenir un studio 100% Battlefield 6 – un virage stratégique qui sonne comme un glas pour Need for Speed.
  • Need for Speed Unbound (2022) : des mises à jour stoppées après seulement 2 ans, malgré un potentiel esthétique inédit (street art, style animé). Un gâchis qui confirme le désamour d’EA.
  • Speedhunters, le média automobile financé par EA depuis 2014, ferme ses portes – symbole d’un désengagement culturel et communautaire autour de la franchise.
  • 2025 : fin des serveurs pour Need for Speed Rivals (2013), dernier clou dans le cercueil d’une licence autrefois dominante face à Forza et Gran Turismo.
  • Concurrence impitoyable : tandis qu’EA enterre Need for Speed, Sony et Microsoft injectent des millions dans leurs franchises de course, avec des mises à jour régulières et des partenariats automobiles prestigieux.
  • Les fans de Burnout (autre licence culte de Criterion) et de Need for Speed sont les grands perdants – sans aucune annonce pour combler le vide.
  • Un pattern inquiétant : après Dead Space, Mass Effect (avant sa résurrection), et Star Wars (hors Jedi), Need for Speed rejoint la liste des licences sacrifiées par EA au profit de ses "cash cows" (FIFA, Battlefield, Apex Legends).

Criterion Games : de Burnout à Battlefield, l’agonie d’un studio légendaire

Il fut un temps où Criterion Games rimait avec adrenaline pure. Le studio britannique, fondé en 1993, avait marqué l’histoire du jeu vidéo avec des titres comme Burnout 3: Takedown (2004) – un chef-d’œuvre de course arcade où les crashes spectaculaires primaient sur la précision – ou encore Need for Speed: Most Wanted (2005 et 2012), considéré par beaucoup comme le meilleur épisode de la saga. Des jeux qui alliaient sensation de vitesse, bandes-son électrisantes (de The Prodigy à Avenged Sevenfold), et une philosophie "fun avant tout".

Aujourd’hui, ce même studio n’est plus qu’une coquille vide pour EA. Le rebranding officiel en *"A Battlefield Studio"*, annoncé en avril 2024, a confirmé ce que beaucoup redoutaient : Criterion ne fera plus de jeux de course. Pire, il ne fera que du Battlefield, une franchise FPS en perte de vitesse depuis des années. Un choix d’autant plus surprenant que le dernier opus du studio, Need for Speed Unbound (2022), avait tenté une réinvention audacieuse – mélange de street art dynamique, de personnages stylisés façon cel-shading, et d’une bande-son hip-hop/électro signée A$AP Rocky ou Skrillex.

Pourtant, malgré des ventes correctes (sans être exceptionnelles) et un accueil critique mitigé (73/100 sur Metacritic), le jeu avait un potentiel énorme. Les joueurs les plus engagés espéraient des mises à jour majeures : nouveaux circuits inspirés de villes comme Tokyo ou Dubaï, des collaborations avec des marques automobiles (à l’image de Forza Horizon 5 et ses Lamborghini ou Porsche exclusives), ou même un mode multijoueur compétitif plus abouti. Las : tout s’est arrêté net en 2024, quand EA a redirigé les ressources vers Battlefield 6.

Le pire ? Ce n’est même pas une surprise. Depuis 2015, Criterion n’était plus qu’un studio-support pour d’autres projets EA, comme Star Wars Battlefront (2015) ou Battlefield V (2018). La fermeture de Speedhunters, en mars 2024, a simplement acté ce que tout le monde savait : EA a abandonné les jeux de course. Et avec eux, une partie de son âme.


"On nous avait promis un retour aux sources avec Unbound. Au lieu de ça, on a eu un jeu inachevé, puis plus rien. C’est comme si EA avait décidé que les courses, c’était trop compliqué pour eux." — Marc, joueur depuis Need for Speed III: Hot Pursuit (1998)

Need for Speed Unbound : le dernier souffle d’une franchise en sursis

Sorti le 2 décembre 2022, Need for Speed Unbound était censé être le grand retour de la licence. Après l’échec cuisant de Need for Speed Payback (2017) – critiqué pour son scénario ridicule, ses microtransactions agressives, et son gameplay bancal – EA avait promis une réinvention totale. Le pari ? Mélanger l’ADN arcade des premiers Need for Speed avec une direction artistique osée, inspirée du street art et des cultures urbaines.

Résultat : un jeu visuellement sublime (les effets de peinture qui s’animent en fonction de la vitesse sont toujours aussi impressionnants), mais inégal. Les points forts ?

  • L’ambiance : la ville fictive de Lakeshore City, inspirée de Chicago, regorge de détails – tags mural, néons, et une bande-son qui claque (avec des titres exclusifs comme "Shumway" d’A$AP Rocky).
  • Le gameplay : un mélange réussi entre dérives accessibles (style Fast & Furious) et mécaniques de tuning poussées (pour les puristes).
  • Le mode histoire : enfin un scénario qui ne donne pas envie de sauter les cinématiques (même s’il reste très cliché).

Les points faibles, eux, étaient révélateurs des problèmes structurels de la franchise :

  • Un contenu léger : seulement 4 zones à explorer, contre 12 pour Forza Horizon 5. Les courses se répètent vite.
  • Des bugs persistants : collisions étranges, IA parfois trop agressive (ou trop passive), et des problèmes de netcode en multijoueur.
  • Un support post-lancement fantôme : contrairement à Gran Turismo 7 (qui reçoit encore des mises à jour en 2024), Unbound n’a eu droit qu’à quelques événements limités avant d’être abandonné.

Pourtant, malgré ces défauts, le jeu avait un vrai public. Les streamers comme Shroud ou Lirin en avaient fait leur jeu de course préféré fin 2022, et les communautés de tuning adoraient le système de personnalisation. Mais EA n’a pas cru en son potentiel. Alors que Forza Horizon 5 a reçu plus de 20 mises à jour gratuites en 3 ans, Unbound a été laissé pour mort au bout de 18 mois. Un gâchis monumental, quand on sait que le jeu s’est vendu à plus de 5 millions d’exemplaires (selon les estimations de NPD Group).


"Unbound était loin d’être parfait, mais c’était le premier Need for Speed depuis des années où j’avais envie de jouer plus de 10 heures. Dommage qu’EA ait décidé de tout arrêter si vite. À croire qu’ils ne veulent plus rivaliser avec Forza." — Thomas, moddeur et créateur de livrées pour NFS Unbound

Speedhunters, Need for Speed Rivals... : la purge silencieuse d’EA

Si le sort de Criterion Games et d’Unbound est symbolique, deux autres annonces ont confirmé que EA tournait définitivement la page :

  1. La fermeture de Speedhunters (mars 2024) : ce média, racheté par EA en 2014, était la vitrine culturelle de Need for Speed. Reportages sur les scènes tuning japonaises, interviews de pilotes de drift, et même des collaborations avec des artistes (comme le graffeur Ben Eine) – tout ça a disparu du jour au lendemain. "EA a archivé Need for Speed", a résumé Matthew Everingham, l’un de ses contributeurs historiques. Une phrase qui en dit long.

  2. L’extinction des serveurs de Need for Speed Rivals (prévue pour octobre 2025) : sorti en 2013, ce jeu était le dernier à proposer une expérience multijoueur compétitive dans la saga. Sa fermeture signera la fin d’une époque – et privera les joueurs d’un titre encore actif aujourd’hui, avec des communautés de speedrunners et de drifteurs très engagées.

Ces décisions s’inscrivent dans une stratégie globale d’EA : se concentrer sur les licences "rentables à court terme". FIFA (même après la perte de la licence officielle), Apex Legends, et Battlefield (malgré ses déboires récents) restent prioritaires. Les jeux de course, eux, sont trop coûteux à développer (licences automobiles, modélisation 3D ultra-précise) pour des retours sur investissement incertains.

Pourtant, le marché est là : Gran Turismo 7 a dépassé les 7 millions de ventes en 2024, et Forza Horizon 5 reste l’un des jeux les plus joués sur Xbox Game Pass. Mais EA, visiblement, préfère miser sur des FPS ou des jeux-service – quitte à laisser filer un public fidèle.


"Rivals avait encore des serveurs pleins en 2023. Des mecs organisaient des tournois de police vs coureurs. Maintenant, EA nous dit : 'Débrouillez-vous ailleurs'. C’est ça, le respect du joueur en 2024 ?" — Alex, administrateur d’un serveur Discord dédié à NFS Rivals

Et maintenant ? L’avenir (incertain) de Need for Speed

Alors, Need for Speed est-il mort ? Pas officiellement. EA n’a pas annoncé la fin de la licence, et des rumeurs persistent sur un nouvel opus développé par un autre studio (peut-être Codemasters, racheté en 2021). Mais plusieurs signes laissent penser que la franchise est en pause indéfinie :

  • Aucune fuite crédible depuis 2023. D’habitude, les jeux EA fuient 18 à 24 mois avant leur sortie (cf. Star Wars Jedi: Survivor). Silence radio.
  • Les dépôts de marques : EA n’a renouvelé aucun trademark lié à Need for Speed depuis 2022 (contrairement à Battlefield ou Dragon Age).
  • L’absence aux événements gaming : aucun teasing lors de l’EA Play 2024, ni même une mention dans les rapports financiers du groupe.

Si un nouveau jeu voit le jour, il faudra s’attendre à :

  • Un développement externalisé (comme Need for Speed Heat, confié à Ghost Games avant sa fermeture en 2023).
  • Un modèle économique agressif : après l’échec des loot boxes dans Payback, EA pourrait tenter les battle passes ou les DLC payants dès le lancement.
  • Une sortie discrète : plus question d’un blockbuster comme à l’époque de Most Wanted (2012). Un jeu low-cost, peut-être même free-to-play, semble plus probable.

Face à ça, les fans ont trois options :

  1. Se tourner vers la concurrence : Forza Horizon 6 (prévu en 2025) ou Gran Turismo 8 (vers 2026) semblent les héritiers naturels de NFS.
  2. Explorer les alternatives indie : des jeux comme Art of Rally (pour le côté arcade) ou BeamNG.drive (pour le réalisme) comblent partiellement le vide.
  3. Espérer un retour aux sources : et si EA revendait la licence ? Embracer Group (qui a racheté TimeSplitters) ou Take-Two (avec Rockstar) pourraient redonner un souffle à la saga...


"Je joue à Need for Speed depuis Underground en 2003. Aujourd’hui, je me sens trahi. Pas parce que les jeux étaient parfaits, mais parce qu’EA a arrêté de se battre. Ils ont laissé Microsoft et Sony gagner sans combat." — Julien, 34 ans, collectionneur de voitures miniatures Hot Wheels (et de jeux NFS)

Le syndrome EA : quand une licence meurt à petit feu

Need for Speed n’est pas le premier cas de licence sacrifiée par Electronic Arts. Le scénario se répète :

  1. Une période faste : la licence domine son marché (années 2000 pour NFS, 2010 pour Dead Space).
  2. Des erreurs stratégiques : suites bâclées (NFS: Payback), reboots ratés (SimCity 2013), ou pivot vers le free-to-play (Battlefield Heroes).
  3. Un désengagement progressif : fermetures de studios (Visceral Games pour Dead Space, Ghost Games pour NFS), arrêts des mises à jour, et enfin...
  4. L’oubli : la licence disparaît des radars, jusqu’à ce qu’un concurrent (ou un rachat) la ressuscite – si elle a de la chance.

Pour Need for Speed, le problème est double :

  • La concurrence est trop forte : Forza et Gran Turismo ont des budgets colossaux et des partenariats avec des constructeurs (comme Toyota ou Ferrari).
  • EA n’a plus la culture "course" : après le départ de figures comme Alex Ward (créateur de Burnout) ou la fermeture de Black Box (responsable de NFS: Hot Pursuit 2), il ne reste plus d’experts en interne.

Ironie de l’histoire : alors qu’EA se concentre sur Battlefield 6 (un jeu qui a déçu commercialement en 2021 avec Battlefield 2042), Microsoft et Sony continuent d’investir dans leurs franchises automobiles. Forza Motorsport (2023) a reçu des mises à jour mensuelles, et Gran Turismo Sophy (l’IA de GT7) est devenue une référence en matière de physique.

Alors, Need for Speed peut-il renaître ? Tout dépend de deux facteurs :

  • La pression des fans : si la demande reste forte (via les réseaux, les pétitions, ou les ventes des anciens opus), EA pourrait tenter un comeback – comme avec Dead Space en 2023.
  • Un changement de stratégie chez EA : si Battlefield 6 échoue, le groupe pourrait chercher à diversifier son portefeuille... et ressortir NFS du placard.

En attendant, une chose est sûre : l’âge d’or de Need for Speed – celui de Underground 2, de Most Wanted, ou même de Hot Pursuit (2010) – est bel et bien terminé. Et sans un miracle (ou un rachat), la licence pourrait bien rejoindre Road Rash ou SSX dans le cimetière des franchises EA oubliées.

Les feux de Need for Speed s’éteignent un à un. Entre le rebranding de Criterion en usine à Battlefield, l’abandon pur et simple d’Unbound, et la fermeture de Speedhunters, EA a envoyé un message clair : les jeux de course ne sont plus une priorité. Pendant ce temps, Forza et Gran Turismo caracolent en tête, avec des mises à jour régulières, des partenariats prestige, et des communautés actives. Les fans de la première heure, eux, restent avec un goût amer – celui d’une licence mythique, sacrifiée sur l’autel des FPS et des jeux-service.

Reste une lueur d’espoir : et si, comme Star Wars ou Mass Effect, Need for Speed revenait un jour, transformé, modernisé ? Pour l’instant, une seule certitude : l’ère Criterion est terminée. Et avec elle, une partie de l’âme des jeux de course.

En 2024, la route est libre pour les concurrents. EA, elle, a quitté la course.

L'Avis de la rédaction
Par Nakmen
*"EA a tué Burnout comme Stallone a tué des méchants dans *Cobra* – sans remords, mais avec moins de style."* Criterion, jadis synonyme de *fun pur*, devient un studio-zombie pour *Battlefield*... comme si on forçait Tony Hawk à faire du curling. **Unbound** avait des défauts, mais c’était le seul NFS depuis 10 ans à avoir une âme. Maintenant ? *"On a plus de course, on a plus de rêve"* (© *OSS 117*). **#FreeCriterion** – ou au moins, donnez-leur *Crash Team Racing* à faire. **D’autant plus que** Forza et GT prouvent qu’il y a un marché. EA préfère visiblement perdre des millions en FPS ratés. *"C’est pas faux"* (© *Kaamelott*).

Ils en parlent aussi

Article rédigé par SkimAI
Révisé et complété par Nakmen