Il y a 12 jours
EA sur le point de devenir privé : un rachat à 50 milliards de dollars qui pourrait tout changer
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Un géant du jeu vidéo en pleine mutation
Electronic Arts (EA) pourrait bien vivre un tournant historique. Selon des informations exclusives du Wall Street Journal, le studio serait sur le point d’être racheté pour 50 milliards de dollars par le Public Investment Fund (PIF) saoudien et le fonds Silver Lake, dans ce qui serait le plus grand leveraged buyout (LBO) jamais réalisé. Cette opération, qui pourrait retirer EA de la Bourse, soulève des questions majeures : quelles conséquences pour l’indépendance créative du géant des simulations sportives ? Comment le PIF, déjà controversé pour son influence dans le sport, pourrait-il façonner l’avenir de licences emblématiques comme EA Sports FC (ex-FIFA) ou Skate ? Entre opportunités et risques, ce rachat pourrait redéfinir les équilibres du secteur.A retenir :
- 50 milliards de dollars : le montant record du rachat d’EA, qui dépasserait largement sa valorisation actuelle (43 milliards), faisant de cette opération le plus grand LBO de l’histoire.
- Le Public Investment Fund (PIF) saoudien, déjà actionnaire minoritaire d’EA (2,6 %), et Silver Lake pilotent ce projet, confirmant l’expansion aggressive des investisseurs du Golfe dans le jeu vidéo (Activision Blizzard, Take-Two, Nintendo).
- Une stratégie de diversification pour EA : après la perte de la licence FIFA (devenu EA Sports FC avec 23 millions de joueurs en 2023) et le retour de Skate en free-to-play, le studio mise sur l’innovation, mais son avenir privé interroge.
- Le PIF, critiqué pour son ingérence dans le sport (LIV Golf, Newcastle United), pourrait-il influencer les choix créatifs d’EA ? Un débat qui divise déjà les observateurs.
- Une annonce officielle attendue dès la semaine prochaine, susceptible de bouleverser l’industrie du jeu vidéo et les dynamiques géopolitiques du secteur.
Un rachat historique qui dépasse tous les records
Imaginez un instant : un géant du jeu vidéo, coté en Bourse depuis des décennies, quitte soudainement les marchés pour passer sous contrôle privé, via une opération financière sans précédent. C’est précisément le scénario qui se dessine pour Electronic Arts (EA), selon des sources internes révélées par le Wall Street Journal. Le montant de la transaction ? 50 milliards de dollars, soit bien au-delà de la valorisation actuelle d’EA, estimée à environ 43 milliards. Pour comparaison, le précédent record en matière de leveraged buyout (LBO) remontait à 2007, avec le rachat de TXU pour 32 milliards. Cette fois, c’est l’ensemble de l’industrie du jeu vidéo qui pourrait être ébranlée.
Derrière cette opération colossale se cachent deux acteurs majeurs : le Public Investment Fund (PIF), le fonds souverain saoudien, et Silver Lake, un fonds d’investissement américain spécialisé dans la technologie. Le PIF n’est pas un inconnu pour EA : il détient déjà 2,6 % de ses actions, une participation qui pourrait bientôt se transformer en contrôle total. Mais ce rachat ne concerne pas seulement EA. Il s’inscrit dans une stratégie globale d’influence des investisseurs du Golfe sur le secteur du divertissement, après des prises de participation dans des géants comme Activision Blizzard, Take-Two Interactive (éditeur de Grand Theft Auto), ou encore Nintendo. Une tendance qui ne cesse de s’accélérer, et qui pose la question : qui contrôlera demain les licences les plus populaires du jeu vidéo ?
L’Arabie Saoudite, futur roi du jeu vidéo ?
Le PIF n’est pas un simple investisseur passif. En mars 2025, il a marqué les esprits en acquérant la division gaming de Niantic (créateur de Pokémon GO) pour 3,5 milliards de dollars, via son studio Scopely. Une opération qui révèle une ambition claire : devenir un acteur incontournable de l’industrie, bien au-delà des simples participations financières. Le fonds détient déjà des parts dans Embracer Group (propriétaire de franchises comme Borderlands ou Tomb Raider), et finance des projets controversés comme la LIV Golf, une ligue de golf en concurrence directe avec les circuits traditionnels.
Pour l’Arabie Saoudite, ces investissements s’inscrivent dans une diversification économique massive, visant à réduire sa dépendance au pétrole. Mais ils répondent aussi à une volonté d’influence culturelle, parfois critiquée. Le PIF a déjà essuyé des accusations d’« sportwashing » – l’utilisation du sport (et désormais du jeu vidéo) pour améliorer son image internationale. Avec EA, le fonds pourrait étendre cette stratégie à des licences suivies par des centaines de millions de joueurs à travers le monde. Quelles seraient les conséquences pour des franchises comme FIFA (devenu EA Sports FC) ou Madden, si leurs orientations créatives devaient s’aligner sur les attentes d’un État ?
Certains analystes y voient une opportunité pour EA : libéré des pressions actionnariales et des exigences de rentabilité trimestrielle, le studio pourrait enfin prendre des risques créatifs. D’autres, plus sceptiques, craignent une ingérence politique, surtout après les polémiques autour de la LIV Golf ou du rachat du club de football Newcastle United. Une chose est sûre : si ce rachat aboutit, il marquera un changement de paradigme pour l’industrie.
« Skate » et « EA Sports FC » : l’innovation comme bouclier ?
Pendant que les négociations se précisent dans l’ombre, EA continue de jouer la carte de l’innovation. Après la rupture tonitruante avec la FIFA en 2022 – un divorce qui a coûté la licence historique, mais pas les joueurs –, le studio a rebaptisé sa franchise phare en EA Sports FC. Résultat ? 23 millions de joueurs en 2023, preuve que la marque survit (et prospère) sans le nom FIFA. Une transition réussie, mais qui a nécessité des investissements massifs en marketing et en partenariats avec des stars comme Kylian Mbappé.
Autre symbole de ce renouveau : le retour de Skate, une licence culte disparue depuis 2010. EA a choisi de la relancer en free-to-play, avec une première saison prévue pour le 7 octobre 2024. Un pari audacieux, qui vise à séduire une génération de joueurs habitués aux modèles gratuits (Fortnite, Apex Legends). « Skate n’est pas juste un retour, c’est une réinvention », déclarait récemment un porte-parole d’EA. Reste à voir si cette stratégie suffira à convaincre les fans historiques, souvent réticents aux changements de formule.
Ces initiatives montrent une volonté claire : diversifier les revenus et réduire la dépendance aux licences sportives. Mais elles soulèvent aussi une question cruciale : sous contrôle privé, EA aura-t-il les moyens (et la liberté) de poursuivre cette voie ? Ou devra-t-il se plier aux attentes de ses nouveaux actionnaires, dont les priorités pourraient différer de celles des joueurs ?
Derrière les chiffres : les enjeux humains et créatifs
Au-delà des montagnes de dollars et des stratégies financières, ce rachat a des conséquences très concrètes pour les équipes d’EA. Depuis des années, le studio est critiqué pour ses conditions de travail, notamment via le mouvement #GameWorkersUnite. Certains employés redoutent que la privatisation n’aggrave les pressions, tandis que d’autres espèrent une stabilisation après des années de restructurations.
Du côté des joueurs, les réactions sont partagées. Certains, comme Mark, un streamer spécialisé dans les jeux EA, se montrent optimistes : « Si ça permet à EA de prendre plus de risques sur des licences comme Dead Space ou Mass Effect, je suis pour. Leurs derniers opus étaient trop safe. » D’autres, à l’image de Sophie, joueuse compétitive sur FIFA, s’inquiètent : « Avec le PIF derrière, on va finir avec des microtransactions encore plus agressives, et des jeux conçus pour plaire aux sponsors saoudiens. »
Un débat qui rappelle celui autour de Newcastle United : après son rachat par le PIF, le club anglais a vu ses performances s’améliorer… mais au prix d’une image ternie par les accusations de greenwashing. EA devra naviguer entre ces écueils, tout en maintenant la confiance de ses communautés. Pas une mince affaire, quand on sait que des franchises comme Battlefield ou Star Wars Jedi ont récemment déçu une partie de leur public.
Et maintenant ? Le compte à rebours est lancé
Selon le Wall Street Journal, une annonce officielle pourrait intervenir dès la semaine prochaine. Si le deal est confirmé, il déclenchera sans doute une vague de réactions dans l’industrie :
- Les concurrents (Sony, Microsoft, Tencent) pourraient accélérer leurs propres stratégies d’acquisition pour ne pas se faire distancer.
- Les régulateurs examineront de près les implications antitrust, surtout si le PIF renforce son emprise sur plusieurs studios majeurs.
- Les joueurs attendront des garanties sur l’avenir de leurs licences préférées – et sur l’absence d’ingérence politique dans les contenus.
Un élément pourrait cependant compliquer les choses : l’opposition potentielle des actionnaires actuels. Certains fonds pourraient juger l’offre insuffisante, ou craindre les risques liés à un actionnaire comme le PIF. « 50 milliards, c’est énorme, mais est-ce que ça reflète vraiment la valeur d’EA à long terme ? », s’interroge un analyste de Bloomberg. Une bataille pourrait s’engager… avec, en toile de fond, la question de savoir qui détient vraiment le pouvoir dans le jeu vidéo de demain.