EA Sports FC 25 : Comment un jeu annuel a écrasé GTA VI et dominé l’Europe en 2025

Le coup de tonnerre : quand le football écrase les blockbusters

Septembre 2024. Alors que l’industrie retient son souffle pour GTA VI (finalement reporté à 2026) et que Assassin’s Creed Shadows promet une révolution avec son double protagoniste, c’est un titre annuel, presque routinier, qui va tout balayer. EA Sports FC 25 – ex-FIFA, rappelons-le – s’impose comme le jeu le plus vendu d’Europe en 2025, avec 71 millions d’exemplaires écoulés (source : The Game Business). Un chiffre d’autant plus impressionnant que le marché global accuse un recul de 6 % par rapport à 2024.

Comment expliquer ce succès foudroyant ? D’abord, par une fidélisation sans faille des joueurs. En Europe, le football n’est pas un sport, c’est une religion. Et EA Sports en a fait une machine à cash infatigable. Ensuite, par une stratégie digitale agressive : 74 % des ventes se font en dématérialisé, un record absolu. À titre de comparaison, Cyberpunk 2077 – pourtant phénomène mondial – n’avait atteint "que" 60 % de ventes digitales en 2020.

Mais le vrai secret ? L’écosystème Ultimate Team. Ce mode, où les joueurs collectionnent des cartes de footballeurs (via des packs achetés en monnaie réelle), représente à lui seul plus de 40 % des revenus du jeu (estimations Newzoo). Un modèle si lucratif qu’il a inspiré des concurrents comme Konami avec eFootball… sans jamais égaler son succès.

"EA a transformé le football en un jeu-service permanent. Les joueurs ne paient plus pour un produit fini, mais pour une expérience qui évolue toute l’année." — Thomas Veilleux, analyste chez NPD Group.

Derrière le succès : une machine bien huilée (et controversée)

Contrairement à des titres comme Hogwarts Legacy (4ᵉ) ou The Legend of Zelda: Echoes of Wisdom (12ᵉ), qui misent sur une aventure solo immersive, EA Sports FC 25 repose sur un cycle annuel optimisé. Chaque année, c’est la même recette :

• Mises à jour des effectifs (transfers, notes des joueurs) pour coller à la réalité.
• Nouveaux modes en ligne (comme FC Pro, un mode compétitif revisité).
• Éditions spéciales à prix gonflés (Ultimate Edition à 99,99 €, avec des bonus Ultimate Team).
• Microtransactions intégrées (packs de cartes, cosmétiques) qui génèrent des revenus récurrents.

Résultat ? Une récurrence d’achat que peu de jeux peuvent égaler. Même GTA V – toujours 5ᵉ des ventes européennes 11 ans après sa sortie – ne peut rivaliser avec ce rythme effréné. Rockstar mise sur la longévité, EA Sports sur l’addiction annuelle.

Autre atout majeur : son accessibilité cross-gen. Disponible sur PS4, PS5, Xbox One, Series X|S et PC, le jeu touche un public beaucoup plus large que des exclusivités comme Spider-Man 2 (absent du top 20) ou Starfield (15ᵉ). Une stratégie payante, quand on sait que 52 millions des 71 millions de jeux vendus en 2025 l’ont été en digital – un format où EA excelle, avec des précommandes boostées par des bonus exclusifs.

Pourtant, ce modèle n’est pas sans critiques. Certains joueurs dénoncent une "arnaque annuelle", où les changements sont souvent cosmétiques (nouveaux maillots, animations retravaillées) plutôt que structurels. "C’est toujours le même jeu depuis 10 ans, mais avec un nouveau skin", résume Julien, streamer français spécialisé dans les jeux de sport.

Le paradoxe 2025 : les vieux jeux résistent, les nouvelles IP trébuchent

Si EA Sports FC 25 truste la première place, le reste du top 5 révèle une tendance lourde : les joueurs européens bouderaient l’innovation. À part Split Fiction (6ᵉ), le FPS narratif de Supermassive Games (The Quarry), aucune nouvelle licence ne perce. Pire : des suites très attendues comme Kingdom Come: Deliverance 2 (10ᵉ) ou Dragon’s Dogma 2 (14ᵉ) peinent à rivaliser avec les valeurs sûres.

Preuves en chiffres :

• GTA V (5ᵉ) : 11 ans après sa sortie, toujours dans le top grâce à ses versions PS5/Xbox Series X|S et à GTA Online, qui génère plus de 500 millions de dollars par an (chiffres Take-Two 2024).
• Red Dead Redemption 2 (3ᵉ) : son mode Red Dead Online, bien que moins médiatisé, maintient une communauté active.
• Hogwarts Legacy (4ᵉ) : sorti en 2023, le jeu Harry Potter prouve que l’univers de Poudlard est une machine à ventes intemporelle.
• Mario Kart World (non classé) : s’il était comptabilisé, il aurait pu menacer EA Sports FC 25. Mais Nintendo, comme d’habitude, ne communique pas ses chiffres digitaux.

"Les joueurs préfèrent dépenser leur argent dans des expériences qu’ils connaissent déjà. Une nouvelle IP, c’est un risque – et en période de crise économique, ils évitent les paris." — Marie Dubois, rédactrice en chef de JeuxVideo.com.

Même les remakes s’en sortent mieux que les nouveautés : Oblivion Remastered (11ᵉ) et Dead Space Remake (17ᵉ) trustent les ventes, là où des jeux originaux comme Black Myth: Wukong (19ᵉ) ou Rise of the Ronin (absent du top 20) déçoivent.

L’ombre de Nintendo : et si Mario Kart avait tout changé ?

Il y a un éléphant dans la pièce : Mario Kart World. Sorti en mars 2025, le jeu de course de Nintendo a été un phénomène instantané, avec des ventes physiques record. Mais voici le problème : Nintendo ne communique jamais ses chiffres digitaux. Or, avec la Switch 2 qui se profile, il est probable qu’une grande partie des ventes se soient faites en dématérialisé… et donc invisibles dans les classements officiels.

"Si on ajoutait les ventes digitales de Mario Kart, EA Sports FC 25 aurait peut-être dû se contenter de la deuxième place." — Antoine Claret, analyste chez GSD.

Un scénario qui rappelle 2020, quand Animal Crossing: New Horizons avait dominé les ventes… mais seulement sur le papier, car Nintendo avait sous-estimé les ventes digitales. Cette fois, c’est Mario Kart qui pourrait bien être le vrai vainqueur de 2025.

Le futur : vers une domination sans fin des licences annuelles ?

Avec EA Sports FC 26 déjà annoncé pour septembre 2025, une question se pose : jusqu’où ira cette domination ? Les joueurs semblent prêts à payer chaque année pour des mises à jour mineures, tant que le cœur de l’expérience (le football) reste intact. Et avec l’arrivée de l’IA générative, EA pourrait même automatiser une partie des mises à jour (commentaires, animations), réduisant encore les coûts.

Mais attention : des signes de lassitude apparaissent. Des communautés comme r/FIFA sur Reddit réclament une refonte complète du moteur de jeu, jugé "dépassé" face à des concurrents comme Football Manager (qui, ironiquement, n’apparaît pas dans le top 20). Et avec des jeux comme UFL (le nouveau concurrent free-to-play) qui se profilent, EA pourrait bien devoir innover… ou risquer de perdre son trône.