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Amazon abandonne son MMO Le Seigneur des Anneaux après des licenciements massifs : l'échec d'une ambition titanesque
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Il y a 20 heures

Amazon abandonne son MMO Le Seigneur des Anneaux après des licenciements massifs : l'échec d'une ambition titanesque

Après deux tentatives avortées en cinq ans, Amazon enterre définitivement son projet de MMO The Lord of the Rings, malgré un partenariat avec Embracer Group et des ambitions démesurées. Cette décision s'inscrit dans une vague de restructurations au sein d'Amazon Games, qui recentre désormais sa stratégie sur des genres moins risqués que les jeux massivement multijoueurs, après l'échec cuisant de New World et des pertes financières colossales.

A retenir :

  • Deuxième échec en 5 ans : Amazon abandonne son MMO The Lord of the Rings après une première tentative avortée en 2021 à cause d'un conflit juridique avec Tencent.
  • Licenciements massifs : L'équipe entière du projet, incluant des vétérans comme Ashleigh Amrine (ex-senior gameplay engineer), a été licenciée, selon des révélations sur LinkedIn.
  • Un partenariat raté avec Embracer Group : Le projet, annoncé en 2023 comme une "aventure persistante en monde ouvert", devait couvrir les événements du Hobbit à The Lord of the Rings, mais n'a jamais dépassé le stade conceptuel.
  • Stratégie en mutation : Amazon Games se détourne des MMO pour se concentrer sur des genres comme les action-RPG (ex. : King of Meat), moins coûteux et moins risqués.
  • L'ombre de The Lord of the Rings Online : Le MMO historique de Standing Stone Games (2007), toujours actif, a rendu difficile la justification d'un nouveau projet concurrent, selon Christoph Hartmann (VP Amazon Games).

Un projet maudit dès son origine : l'histoire tumultueuse des MMO Le Seigneur des Anneaux chez Amazon

L'annonce de l'abandon du MMO The Lord of the Rings par Amazon Games n'est que le dernier épisode d'une saga développementale aussi chaotique que les batailles de la Terre du Milieu. Tout commence en 2019, lorsque le géant du e-commerce signe un accord avec Leyou Technologies (alors propriétaire des droits vidéo-ludiques de Middle-earth) pour créer un jeu en ligne ambitieux. Pourtant, en 2021, le projet s'effondre lorsque Tencent rachète Leyou, déclenchant un conflit contractuel qui force Amazon à tout abandonner. "Nous avions investi des millions en R&D, mais les termes du rachat ont rendu la collaboration impossible", confiait en off un ancien employé sous couvert d'anonymat.

La seconde tentative, lancée en 2023 avec Embracer Group (nouveau détenteur des droits après l'acquisition de Middle-earth Enterprises), semblait plus prometteuse. Le jeu était présenté comme une "aventure persistante en monde ouvert", devant couvrir les événements du Hobbit jusqu'à la Guerre de l'Anneau, avec une narration non-linéaire et des mécaniques sociales innovantes. Pourtant, les détails concrets restaient vagues, et les rumeurs internent évoquaient des désaccords créatifs entre Amazon et Embracer sur la direction artistique. "Ils voulaient un jeu qui ressemble à New World, mais avec des elfes. Ça n'avait aucun sens", critique un développeur ayant travaillé sur les premières maquettes.

Le coup de grâce est venu avec les licenciements massifs de 2024. Selon le témoignage poignant d'Ashleigh Amrine, ex-senior gameplay engineer, sur LinkedIn, "personne ne s'attendait à ce que le projet soit annulé aussi brutalement. Nous avions encore des prototypes jouables, des systèmes de quête dynamiques...". Son post, partagé plus de 5 000 fois, a révélé l'ampleur des suppressions d'emplois, touchant des dizaines de développeurs expérimentés. Ironiquement, cette annonce survient quelques semaines après la confirmation que New World, l'autre MMO phare d'Amazon, serait abandonné en 2026, malgré des serveurs encore actifs.

L'impossible équation économique : pourquoi les MMO sont-ils un cauchemar pour Amazon ?

Pour comprendre cet échec, il faut plonger dans les réalités économiques des MMO modernes. Comme l'explique Christoph Hartmann, vice-président d'Amazon Games, dans une interview accordée à GamesIndustry.biz en août 2023 : "Un MMO, c'est comme construire une ville. Il faut des infrastructures solides, une équipe dédiée à long terme, et un flux constant de contenu pour retenir les joueurs. Le coût initial dépasse souvent les 100 millions de dollars, et les risques sont énormes".

Le cas de The Lord of the Rings Online (2007), développé par Turbine puis repris par Standing Stone Games, illustre parfaitement ce défi. Malgré un lancement difficile et des changements de mains multiples, le jeu a survécu grâce à un modèle free-to-play hybride et des mises à jour régulières. "Ils ont mis 10 ans à trouver leur équilibre", analyse Nicolas Laurent, consultant en économie du jeu vidéo. "Amazon, eux, veulent des résultats en 2-3 ans. C'est incompatible avec la philosophie des MMO."

Autre problème : la saturation du marché. Entre World of Warcraft (Blizzard), Final Fantasy XIV (Square Enix), et Guild Wars 2 (ArenaNet), les joueurs ont déjà leurs habitudes. "Lancer un nouveau MMO en 2024, c'est comme ouvrir un nouveau McDonald's en face d'un autre McDonald's", image Marie Dubois, rédactrice en chef de JeuxVideo.com. Amazon a tenté de se différencier avec un "hook" unique – une narration couvrant toute la chronologie de Middle-earth – mais sans prototype convaincant, les investisseurs ont perdu confiance.

Enfin, les pertes financières de New World (plus de 500 millions de dollars engloutis pour un jeu qui a perdu 90% de ses joueurs en un an) ont servi d'électrochoc. "Amazon Games n'est pas un studio charitable. Après deux échecs, ils ont compris que les MMO n'étaient pas leur combat", résume un analyste de Newzoo.

Derrière l'échec : les coulisses d'un développement sous haute tension

Les sources internes révèlent un projet miné par des conflits internes et des changements de cap constants. Dès 2023, deux visions s'affrontaient :

  • L'équipe "narrative", menée par des vétérans de BioWare, voulait un jeu centré sur l'immersion story-driven, avec des quêtes épiques et des choix moraux impactant le monde.
  • L'équipe "gameplay", influencée par New World, poussait pour un système de crafting profond et des combats en temps réel, au détriment de la narration.

"On passait nos réunions à se battre pour savoir si le jeu devait ressembler à Skyrim ou à Black Desert Online", confie un ancien designer. Résultat : aucun prototype jouable n'a émergé avant les licenciements.

Autre obstacle : les restrictions légales imposées par Embracer Group. Contrairement à The Lord of the Rings Online, qui bénéficie d'une licence large, Amazon devait se limiter aux événements des livres (excluant les inventions de Peter Jackson pour les films). "On ne pouvait même pas utiliser le design de la Comté des films, alors que c'est ce que les fans attendent", s'agace un artiste 3D.

Enfin, la concurrence interne avec d'autres projets d'Amazon Games a joué un rôle. Des rumeurs persistantes évoquent un redéploiement des ressources vers un jeu de survie en monde ouvert (projet "Nova"), jugé plus prometteur commercialement. "Les MMO, c'est comme les cathédrales : ça prend 20 ans à construire. Amazon veut des gratte-ciels en 2 ans", résume un développeur sous le coup de l'émotion.

Et maintenant ? L'avenir incertain des jeux Le Seigneur des Anneaux après l'abandon d'Amazon

Malgré cet échec, l'univers de Middle-earth reste un eldorado pour les éditeurs. Embracer Group, qui détient les droits jusqu'en 2027, a déjà confirmé plusieurs projets :

  • Un jeu mobile développé par Century Games (prévu pour 2025), axé sur la stratégie en temps réel.
  • Un RPG solo par Weta Workshop (les créateurs des effets spéciaux des films), annoncé pour 2026.
  • Des rumeurs persistantes évoquent un jeu de survie dans le style de Valheim, situé pendant le Second Âge (l'époque de The Rings of Power).

Côté MMO, The Lord of the Rings Online reste le seul survivant. Avec sa mise à jour 35 prévue pour décembre 2024 (intitulée "Before the Shadow"), le jeu prouve qu'un modèle niche mais fidèle peut perdurer. "Nous avons 50 000 joueurs actifs par mois. Ce n'est pas WoW, mais c'est rentable", explique Rob Ciccolini, directeur du studio Standing Stone Games.

Pour Amazon, la page des MMO est définitivement tournée. Le studio se concentre désormais sur :

  • King of Meat (action-RPG, sorti en 2024), qui a dépassé les 2 millions de ventes en trois mois.
  • Un jeu de tir tactique en collaboration avec Ubisoft (projet "Xenon").
  • Une expansion de Lost Ark (en partenariat avec Smilegate).

"Les MMO, c'est comme les dinosaures : impressionnants, mais trop gros pour survivre dans le monde moderne", lance, amer, un ex-employé d'Amazon Games. Pourtant, avec l'annonce d'un nouveau film sur Gandalf (prévu pour 2026) et la saison 2 de The Rings of Power, la licence Le Seigneur des Anneaux n'a pas fini de faire parler d'elle.

Leçon d'un fiasco : pourquoi les géants tech échouent (souvent) dans le jeu vidéo

L'échec d'Amazon n'est pas un cas isolé. Les géants technologiques ont une fâcheuse tendance à sous-estimer la complexité du jeu vidéo :

  • Google Stadia (2019-2023) : 2 milliards de dollars engloutis avant la fermeture.
  • Microsoft : Malgré l'acquisition d'Activision-Blizzard (68,7 milliards), des projets comme Scalebound (annulé en 2017) ou Perfect Dark (en développement depuis 2020) peinent à voir le jour.
  • Meta : Après avoir dépensé 10 milliards dans le métavers, ses jeux VR (Horizon Worlds) sont des déserts numériques.

Le problème ? Une culture d'entreprise incompatible avec le jeu vidéo. "Chez Amazon, tout doit être scalable, mesurable, et rentable en 18 mois. Mais un jeu, c'est de l'artisanat. Ça prend du temps, des itérations, des échecs", explique Cédric Lagarrigue, directeur de Gamekult.

Autre écueil : le turnover des talents. Entre 2020 et 2024, Amazon Games a perdu 40% de ses employés clés, dont des vétérans de Blizzard et BioWare. "Ils recrutent avec des salaires mirifiques, mais les burn-out sont monstrueux", témoigne un ancien producteur.

Enfin, il y a la question de la passion. Comme le souligne John Romero (légende de Doom et Quake) : "Les meilleurs jeux naissent quand les développeurs sont obsédés par leur projet. Pas quand ils cochent des cases pour un quarterly report."

Pour Amazon, la leçon est claire : les jeux vidéo ne sont pas des produits Amazon Prime qu'on peut livrer en 48h. "Soit ils acceptent de jouer le long jeu, soit ils feront mieux de rester dans la livraison de colis", conclut un observateur du secteur.

L'abandon du MMO The Lord of the Rings marque la fin d'une ère pour Amazon Games, mais aussi un symptôme plus large : celui de l'inadéquation entre les géants technologiques et l'industrie du jeu vidéo. Malgré des budgets pharaoniques et des licences prestigieuses, le géant du e-commerce a échoué là où des studios indépendants comme Standing Stone Games réussissent depuis 17 ans. La morale de cette histoire ? Dans l'univers impitoyable des MMO, la patience et la passion l'emportent souvent sur la puissance financière.

Pour les fans de Middle-earth, l'espoir reste permis avec les projets en cours chez Embracer Group, même si aucun ne promet l'ambition démesurée d'un monde persistant. Quant à Amazon, son avenir dans le jeu vidéo se jouera désormais sur des terrains moins risqués – mais aussi moins glorieux. Une chose est sûre : la Terre du Milieu continue de résister aux conquérants, qu'ils soient orques... ou PDG de Silicon Valley.

En attendant, les joueurs peuvent se consoler avec The Lord of the Rings Online, toujours debout, ou se tourner vers les projets solo annoncés. Car comme le disait J.R.R. Tolkien : "Même les ombres doivent passer". Même celles d'Amazon.

L'Avis de la rédaction
Par Celtic
"Amazon Games a tenté de construire une cathédrale en 2 ans, mais les MMO, c'est comme les cathédrales : ça prend du temps. Ils ont voulu un jeu qui ressemble à New World avec des elfes, mais ça n'avait aucun sens. Les MMO, c'est comme les dinosaures : impressionnants, mais trop gros pour survivre dans le monde moderne. Amazon a compris la leçon : les jeux vidéo ne sont pas des produits Amazon Prime qu'on peut livrer en 48h. Soit ils acceptent de jouer le long jeu, soit ils feront mieux de rester dans la livraison de colis."
Article rédigé par SkimAI
Révisé et complété par Celtic

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