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Amazon Games : la fin d’un rêve AAA ? Licenciements et abandon des MMOs après des échecs cuisants
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Il y a 2 jours

Amazon Games : la fin d’un rêve AAA ? Licenciements et abandon des MMOs après des échecs cuisants

Amazon Games abandonne ses ambitions AAA : après des milliards investis et des promesses tonitruantes, le géant technologique se retire des MMOs et recentre sa stratégie. New World et Lost Ark, malgré des lancements spectaculaires, n’ont pas suffi à rivaliser avec des monstres comme World of Warcraft ou Final Fantasy XIV. Résultat : des centaines de licenciements, l’abandon d’un MMO Le Seigneur des Anneaux et d’un Tomb Raider multijoueur, et une question brûlante – Amazon peut-il encore prétendre exister dans le jeu vidéo ?

A retenir :

  • Restructuration brutale : Amazon Games licencie des centaines d’employés dans ses studios d’Irvine et San Diego, mettant fin à des projets AAA et MMOs jugés non rentables.
  • Des échecs malgré les moyens : New World (2,5M de joueurs au lancement) et Lost Ark (1,3M sur Steam) n’ont pas tenu leurs promesses, avec une chute de 60 % des recettes pour ce dernier en un an.
  • Licences prestigieuses sacrifiées : un MMO Le Seigneur des Anneaux et un Tomb Raider multijoueur annulés, malgré des univers porteurs et des communautés fidèles.
  • Stratégie en question : après des milliards dépensés et des annonces triomphales, Amazon se recentre sur des projets "plus sûrs", loin des ambitions initiales.
  • Concurrence écrasante : face à des géants comme Blizzard (World of Warcraft) ou Square Enix (Final Fantasy XIV), Amazon n’a pas su trouver sa place.

2024, l’année où Amazon a abandonné le rêve du "Netflix du jeu vidéo"

Il y a encore deux ans, Christoph Hartmann, vice-président d’Amazon Games, jurait que l’entreprise allait "continuer à investir massivement" dans ses studios. En 2021, le géant annonçait fièrement New World, un MMORPG censé rivaliser avec World of Warcraft. En 2022, c’était au tour de Lost Ark, un titre coréen sous licence Smilegate, de faire vibrer les joueurs avec ses graphismes époustouflants et son gameplay ultra-dynamique. Pourtant, en ce début 2024, le constat est amer : Amazon Games se retire des MMOs, licencie des centaines d’employés, et enterre des projets phares comme un MMO Le Seigneur des Anneaux ou un Tomb Raider multijoueur.

Comment en est-on arrivé là ? Entre promesses non tenues, concurrence écrasante et modèles économiques hasardeux, le géant du e-commerce a sous-estimé la complexité d’un marché dominé par des acteurs historiques. Pourtant, tout avait si bien commencé…

New World et Lost Ark : des lancements en fanfare, des chutes vertigineuses

25 septembre 2021 : New World bat des records avec 2,5 millions de joueurs simultanés à son lancement, devenant le jeu le plus joué sur Steam. Les serveurs saturent, les streams explosent, et Amazon semble enfin avoir trouvé la formule magique pour percer dans le jeu vidéo. Pourtant, quelques mois plus tard, le titre s’effondre : moins de 200 000 joueurs actifs en 2023, selon SteamDB. Les critiques fusent : manque de contenu, répétitivité, et surtout, une gestion chaotique des mises à jour qui a découragé même les plus fidèles.

Février 2022 : Lost Ark, développé par Smilegate RPG et publié par Amazon en Occident, crée lui aussi l’événement avec 1,3 million de joueurs simultanés sur Steam. Le jeu, free-to-play mais ultra-généreux en microtransactions, séduit par son approche "Diablo-like" et ses donjons coopératifs. Pourtant, un an plus tard, SuperData révèle une chute de 60 % des recettes mensuelles. Le problème ? Un modèle économique trop agressif, une fatigue des joueurs face aux grind interminables, et une concurrence féroce : Final Fantasy XIV (27 millions de comptes) et Guild Wars 2 (plus de 10 ans d’existence) n’ont pas tremblé.

"Amazon a cru pouvoir acheter sa place dans le jeu vidéo avec des chèques et des licences, mais ils ont oublié une chose : les joueurs ne restent que si le jeu les mérite."Marc "DomisLive" Daniau, streamer et analyste jeu vidéo.

Le Seigneur des Anneaux et Tomb Raider : quand les licences cultes ne suffisent plus

Parmi les projets abandonnés, deux noms font particulièrement mal : un MMO Le Seigneur des Anneaux, développé en collaboration avec Leyou Technologies, et un Tomb Raider multijoueur, imaginé avec Crystal Dynamics. Deux franchises ultra-porteuses, avec des communautés fidèles et des univers riches. Pourtant, Amazon a jeté l’éponge.

Pour Le Seigneur des Anneaux, l’échec est d’autant plus cuisant que l’univers de Tolkien a déjà fait ses preuves dans le jeu vidéo : The Lord of the Rings Online (2007) tient toujours debout, et Shadow of Mordor (2014) a marqué les esprits. Mais selon des sources internes citées par Bloomberg, le projet d’Amazon souffrait de désaccords créatifs, de retards à répétition, et surtout, d’un manque de vision claire : voulait-on un MMO classique, ou une expérience narrative innovante ? Personne ne semblait le savoir.

Quant à Tomb Raider, la licence a connu un regain de popularité avec le reboot de 2013, mais un jeu multijoueur était un pari risqué. Crystal Dynamics, racheté par Embracer Group en 2022, aurait préféré se concentrer sur des aventures solo, plus fidèles à l’ADN de Lara Croft. Amazon, lui, voyait dans le multijoueur un moyen de monétiser à long terme… avant de réaliser que sans une équipe dédiée et une roadmap solide, le projet était voué à l’échec.

"Ils ont acheté des licences comme on achète des actions en Bourse, en espérant un retour rapide. Mais un MMO, ça se construit sur 10 ans, pas en 2 ans de développement accéléré."Jean-Zeph, ex-dév chez Ubisoft et consultant.

Pourquoi Amazon a (encore) échoué là où Blizzard et Square Enix réussissent

La question brûle les lèvres : comment un géant comme Amazon, avec des milliards de dollars de budget et des licences prestigieuses, a-t-il pu se planter à ce point ? Plusieurs raisons expliquent ce fiasco :

  • Une culture d’entreprise inadaptée : Amazon est une machine à cash-flow, pas un studio créatif. Ses processus de validation lentissimes et sa méconnaissance des joueurs ont étouffé l’innovation.
  • Des attentes irréalistes : vouloir rivaliser avec World of Warcraft (18 ans d’existence) ou Final Fantasy XIV (10 ans) en 2-3 ans était une illusion.
  • Un modèle free-to-play mal maîtrisé : Lost Ark a montré les limites d’un jeu où les microtransactions deviennent obligatoires pour progresser, alienant une partie des joueurs.
  • Un manque de patience : les MMOs vivent sur le long terme. Amazon, lui, voulait des résultats immédiats.

À titre de comparaison, Square Enix a mis 5 ans à redresser Final Fantasy XIV après son lancement catastrophique en 2010. Aujourd’hui, c’est l’un des MMOs les plus rentables au monde. Blizzard, malgré les polémiques récentes, maintient World of Warcraft depuis 2004 grâce à des extensions régulières et une communauté ultra-engagée. Amazon, lui, a préféré couper les vivres au premier signe de faiblesse.

Et maintenant ? Amazon Games a-t-il encore un avenir ?

Officiellement, Amazon assure que cette restructuration est une "optimisation" pour se concentrer sur des projets "plus prometteurs". En réalité, les rumeurs évoquent un recentrage sur :

  • Des jeux mobiles (moins coûteux, monétisation plus simple).
  • Des titres en cloud gaming (via Luna, sa plateforme), où la concurrence est moins féroce.
  • Des partenariats externes plutôt que des développements internes, pour limiter les risques.

Pourtant, certains observateurs restent sceptiques. "Amazon a brûlé des centaines de millions en quelques années sans rien construire de durable. Qui va encore leur faire confiance ?", interroge Julien Chièze, journaliste chez Gamekult. D’autres, comme Serge Hascoët (ex-Ubisoft), estiment que le géant pourrait rebondir en misant sur des jeux narratifs ou des expériences sociales (à la Among Us), moins gourmands en ressources.

Une chose est sûre : après cette purge, Amazon Games ne sera plus jamais perçu comme un concurrent sérieux des ténors du secteur. Et pour les centaines d’employés licenciés, souvent des vétérans venus de Bioware, Riot ou Blizzard, la pilule est amère. Certains ont déjà rejoint Microsoft ou Sony ; d’autres, plus cyniques, résument la situation en une phrase : "Amazon a cru que le jeu vidéo, c’était comme vendre des livres sur Kindle. Sauf que les joueurs, eux, ne se laissent pas emballer aussi facilement."

"On nous avait promis la Lune…" : témoignages de dévs licenciés

Sous couvert d’anonymat, d’anciens employés d’Amazon Games Irvine et San Diego ont accepté de partager leur expérience. Leurs récits dessinent le portrait d’une division en perte de repères, où les objectifs changeaient tous les trimestres.

"En 2021, on nous disait : ‘On va faire mieux que WoW’. En 2022, c’était : ‘Lost Ark va tout écraser’. En 2023, plus personne ne parlait de MMOs. Juste de ‘rentabilité’ et de ‘réduction des coûts’." — Un ex-game designer.

"Le pire, c’est qu’on avait des idées géniales. Un système de guildes révolutionnaire pour le MMO Tolkien, des mécaniques de survie hyper-immersives pour New World… Mais à chaque fois, la direction bloquait sous prétexte que ‘ça coûterait trop cher’ ou que ‘les joueurs ne comprendraient pas’." — Une ex-level designer.

Certains évoquent même un climat toxique, où les équipes étaient surchargées pour tenir des délais irréalistes, avant d’être licenciées sans avertissement. "Ils nous ont virés par email. Pas de meeting, pas d’explications. Juste un mail à 9h du matin pour nous dire qu’on avait 30 minutes pour vider notre bureau."

La page des ambitions démesurées d’Amazon Games se tourne dans un bruit sourd. Après des années de promesses, de milliards dépensés et de licences prestigieuses acquises, le géant se retire des MMOs et des projets AAA, laissant derrière lui des centaines d’employés licenciés et des joueurs déçus. New World et Lost Ark resteront comme des exemples frappants de lancements tonitruants suivis de chutes vertigineuses, incapables de rivaliser avec des monstres sacrés comme World of Warcraft ou Final Fantasy XIV. Pourtant, l’histoire n’est peut-être pas totalement écrite. Si Amazon parvient à tirer les leçons de ses échecs – en misant sur des projets plus modestes mais mieux maîtrisés, ou en s’appuyant sur son cloud gaming via Luna –, une seconde chance reste possible. Mais une chose est sûre : dans l’industrie du jeu vidéo, l’argent ne suffit pas. Il faut aussi de la passion, de la patience, et une compréhension fine de ce que veulent vraiment les joueurs. Trois choses qu’Amazon, jusqu’ici, n’a pas su trouver.
L'Avis de la rédaction
Par Nakmen
Amazon Games a cru pouvoir acheter sa place dans le jeu vidéo avec des chèques et des licences, mais ils ont oublié une chose : les joueurs ne restent que si le jeu les mérite.
Article rédigé par SkimAI
Révisé et complété par Nakmen

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