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« Chained Together », ce jeu coopératif méconnu qui va devenir un film – et pourquoi Hollywood mise sur les pépites indés
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Il y a 2 jours

« Chained Together », ce jeu coopératif méconnu qui va devenir un film – et pourquoi Hollywood mise sur les pépites indés

Un jeu indépendant devenu viral sur Steam s’apprête à conquérir le grand écran. Chained Together, ce titre coopératif où des joueurs enchaînés doivent s’échapper de l’Enfer, a séduit la productrice de Greenland – preuve que Hollywood scrute désormais les pépites méconnues du gaming. Avec un budget modeste et une mécanique unique, ce projet pourrait bien redéfinir les adaptations de jeux vidéo, loin des blockbusters attendus.

A retenir :

  • Un phénomène Steam : Sorti en 2024 sans promotion, Chained Together a accumulé 11 000 avis positifs en deux semaines, devenant un cas d’école du bouche-à-oreille numérique.
  • Une mécanique cinégénique : L’interdépendance forcée entre joueurs, liée par des chaînes, offre une "base narrative unique" selon les scénaristes Cory Todd Hughes et Adrian Speckert.
  • Liberté créative totale : Contrairement à A Way Out ou The Last of Us, le jeu n’a aucune intrigue préexistante – un défi pour les adaptateurs, mais aussi une opportunité.
  • Un tournant pour les indés : Après Fallout et Arcane, cette adaptation confirme que les studios misent sur des concepts originaux plutôt que sur des licences établies.
  • Un budget minimaliste : À 5€ sur Steam, le jeu prouve qu’un succès critique peut naître sans millions en marketing – une leçon pour l’industrie.

L’ascension fulgurante d’un jeu "accidentel"

En février 2024, un titre discret apparaît sur Steam : Chained Together, développé par le petit studio Anegar Games. Sans campagne marketing, sans influenceurs sous contrat, le jeu se contente d’un pitch intrigant : "Deux à quatre joueurs, enchaînés les uns aux autres, doivent escalader les neuf cercles de l’Enfer pour s’échapper, en coopérant… ou en se sabotant." Le concept, inspiré des jeux de plateforme punitifs comme Celeste ou Getting Over It, ajoute une couche de chaos contrôlé via des chaînes qui limitent les mouvements.

Les premières semaines sont calmes. Puis, un streamer brésilien, @GamerBr42, diffuse une partie hilarante où son équipe s’auto-détruit en tentant de sauter par-dessus un précipice. La vidéo devient virale. En 48 heures, les ventes explosent : 50 000 exemplaires écoulés, puis 100 000. Les avis Steam affluents, avec une note moyenne de 94% positifs. "C’est le jeu le plus stressant et le plus drôle que j’aie joué cette année", écrit un joueur. Un autre compare l’expérience à "un mélange entre Overcooked et Dark Souls, mais en pire… et en mieux."

Le succès repose sur trois piliers :

  • La simplicité : Une mécanique facile à comprendre (sauter, grimper), mais diabolique à maîtriser à plusieurs.
  • L’humour noir : Les joueurs rient de leurs échecs, comme dans Human: Fall Flat, mais avec une esthétique gothique et infernale.
  • Le prix : À 5€, le risque d’achat est quasi nul – un argument massif pour les joueurs hésitants.

Pour Thomas Veauvy, analyste chez Newzoo, ce phénomène illustre un changement de paradigme : "Les joueurs recherchent des expériences sociales et imprévisibles. Chained Together comble ce besoin avec un design minimaliste, mais ultra-efficace. C’est la preuve que l’innovation ne nécessite pas des budgets pharaoniques."


Petite anecdote : Le studio Anegar Games, basé à Barcelone, n’avait initialement prévu qu’une démo technique pour tester un moteur physique maison. La réaction des testeurs a été si enthousiaste qu’ils ont décidé de finaliser le jeu en six mois seulement.

Pourquoi Hollywood s’intéresse aux "jeux sans histoire"

Le 12 mars 2024, le site Deadline révèle qu’Anton Productions (à l’origine de Greenland avec Gerard Butler) a acquis les droits de Chained Together pour en faire un long-métrage. Une surprise ? Pas vraiment. Depuis le triomphe de The Last of Us (HBO) et Arcane (Netflix), les studios fouillent les catalogues de jeux pour y dénicher des concepts visuels forts, même dépourvus de narration.

Cory Todd Hughes et Adrian Speckert, les scénaristes attachés au projet, soulignent dans un communiqué : "La prémisse de Chained Together est une métaphore parfaite de la condition humaine : nous sommes tous liés, parfois contre notre gré, et devons collaborer pour survivre. Le côté absurde et tragique du jeu offre un terrain de jeu infini pour explorer des thèmes comme la confiance, la trahison, ou la rédemption."

Contrairement à des adaptations comme Uncharted ou Tomb Raider, qui s’appuient sur des décennies de lore, Chained Together part d’une page blanche. Un atout, selon Julie Menard, productrice chez Blumhouse : "Les jeux avec une histoire fixe limitent la créativité. Là, on peut inventer des personnages, un univers, une mythologie… Tout en gardant l’ADN du jeu : l’interdépendance forcée."

Le défi ? Transposer à l’écran la dynamique coopérative qui fait le sel du jeu. Plusieurs pistes sont évoquées :

  • Un film à sketches : Chaque segment montrerait un groupe différent (des criminels, des amis, des inconnus) confronté à l’Enfer.
  • Une comédie noire : À la Saw, mais avec un ton plus satirique, comme Ready or Not.
  • Un thriller psychologique : Où les chaînes symboliseraient des liens familiaux ou sociaux toxiques.

L’autre question est budgétaire. Chained Together mise sur des environnements stylisés et un gameplay plutôt que sur des cinématiques coûteuses. "Un film fidèle coûterait entre 30 et 50 millions", estime Mark Williams, expert en adaptations chez Screen Rant. "Mais s’ils optent pour une approche plus abstraite, comme Everything Everywhere All at Once, le budget pourrait chuter à 15 millions."


Fun fact : Le jeu a été comparé à Hell’s Kitchen (l’émission de Gordon Ramsay) par certains joueurs, pour son mélange de stress collectif et de débâcles comiques.

Dans l’ombre des géants : comment les indés bousculent les adaptations

Le projet Chained Together s’inscrit dans une tendance plus large : l’essor des adaptations de jeux indépendants. Après Undertale (en développement chez Game Theory Films) et Hades (série animée annoncée par Netflix), les studios réalisent que les petits jeux offrent souvent des idées plus originales que les AAA.

Preuve en est : A Way Out (2018), autre jeu coopératif sans histoire complexe, va lui aussi avoir droit à une adaptation – Split Fiction, avec Sydney Sweeney. "Les jeux comme Chained Together ou A Way Out prouvent qu’une mécanique forte peut remplacer un scénario élaboré", explique Lena Chen, critique chez Polygon. "C’est un retour aux fondamentaux du storytelling : le conflit et la collaboration."

Cette tendance contraste avec les échecs retentissants des adaptations de gros budgets :

  • Warcraft (2016) : 160M$ de budget, mais un scénario illisible pour les non-joueurs.
  • Assassin’s Creed (2016) : 125M$, critiqué pour son manque de rythme.
  • Doom (2005) : Un désastre malgré la licence culte.

À l’inverse, les adaptations récentes qui marchent (Fallout, The Last of Us) ont en commun :

  • Un respect du matériel source sans esclavage.
  • Des personnages charismatiques (Pedro Pascal, Ella Purnell).
  • Un ton cohérent (sombre pour TLOU, déjanté pour Fallout).

Chained Together pourrait donc bénéficier de cette leçon : "Moins c’est plus". Avec un budget modéré et une liberté créative, le film a une chance de éviter les pièges des blockbusters surchargés. "Le risque est minime, mais le potentiel est énorme", résume Thomas Veauvy. "Si le film capture l’esprit chaotique et drôle du jeu, il pourrait devenir un culte."


Chiffre clé : Selon SteamDB, Chained Together a généré 2,3 millions de dollars en un mois – avec seulement 3 développeurs à temps plein.

L’Enfer comme terrain de jeu : une métaphore universelle

Au-delà de sa mécanique, Chained Together fascine par son cadre infernal. L’Enfer, depuis La Divine Comédie de Dante, est un lieu de punition collective – une thématique qui résonne particulièrement en 2024, dans un monde marqué par les crises sociales et environnementales.

Le jeu s’inspire directement de :

  • L’iconographie médiévale : Les neuf cercles de l’Enfer, les démons grotesques.
  • Les jeux de "roguelite" comme Hades, où la mort est une mécanique centrale.
  • Les expériences sociales : À l’image de The Stanley Parable, qui joue avec les attentes du joueur.

Pour Dr. Élise Morel, spécialiste de la littérature fantastique à la Sorbonne, "l’Enfer de Chained Together n’est pas un décor, mais un miroir des tensions humaines. Les chaînes symbolisent nos dépendances – aux autres, aux réseaux sociaux, aux systèmes politiques. Le jeu devient une allégorie de la société contemporaine."

Cette dimension philosophique pourrait nourrir le film. Imaginez :

  • Un groupe de collègues de bureau enchaînés, reflétant les dynamiques toxiques du travail.
  • Une famille dysfonctionnelle, où chaque membre incarne un péché capital.
  • Des étrangers qui découvrent qu’ils sont liés par un passé commun.

Le studio Anegar Games a d’ailleurs glissé des easter eggs dans le jeu, comme des inscriptions en latin ("Abandonnez tout espoir") ou des références à L’Enfer de Dante. "On voulait que les joueurs sentent qu’ils font partie d’une tradition littéraire, pas juste d’un jeu vidéo", confie Javier Martínez, le directeur artistique.


Comparaison culturelle : Le concept rappelle Cube (1997), où des inconnus doivent collaborer pour survivre dans un labyrinthe mortel – mais avec une touche de comédie absurde.

Et après ? Quand le gaming inspire le cinéma (et vice versa)

L’annonce du film Chained Together pose une question : le cinéma et le jeu vidéo sont-ils en train de fusionner ? Les exemples récents suggèrent une symbiose croissante :

  • Cyberpunk 2077 : Le jeu a été relancé par la série Edgerunners (Netflix).
  • Arcane : La série a doublé les ventes de League of Legends.
  • Five Nights at Freddy’s : Le film (2023) a rapporté 295M$ pour un budget de 20M$.

Pour Chained Together, l’enjeu est de créer un cercle vertueux :

  1. Le film attire de nouveaux joueurs vers le jeu.
  2. Le jeu inspire des mods ou des suites, enrichissant l’univers.
  3. La boucle se referme avec des DLC ou des contenus liés au film.

Un modèle que Javier Martínez envisage déjà : "Si le film marche, on pourrait ajouter un mode ‘Cinéma’ dans le jeu, avec des niveaux inspirés des scènes du film. Ou même une collaboration avec les scénaristes pour une suite narrative."

Mais attention aux écueils. Les adaptations ratées (Silent Hill, Resident Evil) montrent que le succès n’est pas garanti. "Le piège serait de tomber dans le fan service ou, à l’inverse, de trahir l’esprit du jeu", avertit Lena Chen. "Chained Together doit rester drôle et brutal, sinon ça perd son âme."

Enfin, cette adaptation pourrait ouvrir la voie à d’autres jeux mécaniques :

  • Keep Talking and Nobody Explodes (coopération sous pression).
  • Overcooked (chaos culinaire).
  • We Were Here (énigmes en équipe).

"Le cinéma a longtemps snobé les jeux vidéo. Aujourd’hui, il les pille… et c’est tant mieux", conclut Thomas Veauvy. "Des titres comme Chained Together prouvent que le gaming est un laboratoire d’idées – et Hollywood commence enfin à le comprendre."

Chained Together incarne une révolution silencieuse : celle des jeux indépendants qui, sans budget ni hype, s’imposent par leur originalité pure. Son adaptation cinématographique, si elle respecte l’ADN coopératif, absurde et infernal du jeu, pourrait bien devenir un modèle pour les années à venir. Entre A Way Out et Fallout, le film a une chance de prouver que les meilleures histoires naissent parfois là où on ne les attend pas.

Pour les joueurs, c’est une victoire : après des décennies de mépris, le gaming est enfin reconnu comme un vivier de récits innovants. Pour Hollywood, c’est un pari risqué, mais calculé – avec un potentiel de retour sur investissement énorme si le ton est juste. Quant à Anegar Games, ce petit studio espagnol, il vient de vivre le rêve de tout développeur indie : créer un jeu pour le plaisir… et se retrouver propulsé sous les projecteurs.

Reste une question : le film parviendra-t-il à capturer cette magie du chaos partagé qui fait le sel de Chained Together ? Si oui, nous pourrions assister à la naissance d’un nouveau genre – celui des comédies infernales coopératives. Et ça, ce serait diablement excitant.

L'Avis de la rédaction
Par Nakmen
L’ascension fulgurante d’un jeu "accidentel" En février 2024, un titre discret apparaît sur Steam : Chained Together, développé par le petit studio Anegar Games. Sans campagne marketing, sans influenceurs sous contrat, le jeu se contente d’un pitch intrigant : "Deux à quatre joueurs, enchaînés les uns aux autres, doivent escalader les neuf cercles de l’Enfer pour s’échapper, en coopérant… ou en se sabotant." Le concept, inspiré des jeux de plateforme punitifs comme Celeste ou Getting Over It, ajoute une couche de chaos contrôlé via des chaînes qui limitent les mouvements. Les premières semaines sont calmes. Puis, un streamer brésilien, @GamerBr42, diffuse une partie hilarante où son équipe s’auto-détruit en tentant de sauter par-dessus un précipice. La vidéo devient virale. En 48 heures, les ventes explosent : 50 000 exemplaires écoulés, puis 100 000. Les avis Steam affluents, avec une note moyenne de 94% positifs. "C’est le jeu le plus stressant et le plus drôle que j’aie joué cette année", écrit un joueur. Un autre compare l’expérience à "un mélange entre Overcooked et Dark Souls, mais en pire… et en mieux." Le succès repose sur trois piliers : La simplicité : Une mécanique facile à comprendre (sauter, grimper), mais diabolique à maîtriser à plusieurs. L’humour noir : Les joueurs rient de leurs échecs, comme dans Human: Fall Flat, mais avec une esthétique gothique et infernale. Le prix : À 5€, le risque d’achat est quasi nul , un argument massif pour les joueurs hésitants. Pour Thomas Veauvy, analyste chez Newzoo, ce phénomène illustre un changement de paradigme : "Les joueurs recherchent des expériences sociales et imprévisibles. Chained Together comble ce besoin avec un design minimaliste, mais ultra-efficace. C’est la preuve que l’innovation ne nécessite pas des budgets pharaoniques." Le studio Anegar Games, basé à Barcelone, n’avait initialement prévu qu’une démo technique pour tester un moteur physique maison. La réaction des testeurs a été si enthousiaste qu’ils ont décidé de finaliser le jeu en six mois seulement.
Article rédigé par SkimAI
Révisé et complété par Nakmen

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