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Final Fantasy 7 Remake : Pourquoi les "Cheats" de Progression Divisent (et Séduisent) les Fans
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Square Enix bouscule les codes du RPG avec des raccourcis de progression dans Final Fantasy 7 Remake. Une décision audacieuse défendue par Naoki Hamaguchi, qui voit en ces "cheats" un moyen de démocratiser la saga tout en préparant le terrain pour le troisième volet. Entre stratégie commerciale et révolution gameplay, cette approche interroge : et si l’avenir des RPG passait par moins de contraintes et plus de liberté ?
A retenir :
- Final Fantasy 7 Remake ose des raccourcis de progression radicalement inédits : 40h de jeu réduites à moins de 10h, une première pour la licence historique.
- Naoki Hamaguchi assume ce choix controversé : *"Le joueur doit pouvoir décider comment il consomme le contenu"*, s’inspirant des modes "Game+" de The Witcher 3 ou des ajustements de Persona 5 Royal.
- Stratégie cachée : ces options visent à fidéliser les nouveaux joueurs avant le troisième volet, évitant un décrochage face à la complexité narrative de la trilogie.
- Malgré des ventes décevantes pour Rebirth (2,8M vs 5M pour Remake), Hamaguchi promet un final *"à la hauteur"*, avec une annonce officielle *"déjà planifiée"* selon Tetsuya Nomura.
- Critiqué pour son rythme, Rebirth pousse Square Enix à tester ces raccourcis via une mise à jour PS5 pour Remake Intergrade – un laboratoire avant leur généralisation ?
- Débat ouvert : ces "cheats" annoncent-ils une nouvelle ère pour les RPG *live service*, où l’accessibilité primerait sur le challenge traditionnel ?
Des raccourcis qui font débat : quand un RPG historique embrasse l’accessibilité
Imaginez un Final Fantasy 7 Remake où l’épopée de Cloud Strife, habituellement étalée sur 40 heures, se bouclerait en une soirée. C’est désormais possible grâce aux nouveaux raccourcis de progression intégrés par Square Enix – des options que le directeur Naoki Hamaguchi défend bec et ongles, malgré les grincements de dents des puristes. *"Le joueur doit pouvoir décider comment il consomme le contenu"*, martèle-t-il, une philosophie qui rompt avec les dogmes du genre. Ces "cheats", comme les surnomment certains fans, permettent d’accélérer l’expérience de manière drastique : gains d’EXP multipliés, ressources illimitées, voire sauts de chapitres entiers.
Une révolution ? Pas tout à fait. La tendance à l’accessibilité gagne du terrain dans l’industrie, comme en témoignent le mode "Game+" de The Witcher 3 (permettant de rééquilibrer les combats) ou les ajustements de difficulté de Persona 5 Royal. Mais pour une licence aussi emblématique que Final Fantasy, où le *grind* (la répétition de combats pour progresser) faisait presque partie de l’ADN, le choc est réel. *"Certains joueurs veulent vivre l’histoire sans se soucier des mécaniques"*, justifie Hamaguchi, citant en exemple les parents ou les travailleurs avec peu de temps libre. Une réponse à une demande croissante, mais qui soulève une question : jusqu’où peut-on simplifier un RPG sans en altérer l’essence ?
"Un pari risqué pour sauver la trilogie" : la stratégie cachée derrière ces options
Derrière cette apparente générosité se cache une stratégie bien plus calculée. Les ventes de Final Fantasy 7 Rebirth, deuxième volet de la trilogie, ont déçu : 2,8 millions d’exemplaires écoulés en trois mois, contre 5 millions pour Remake en 2020. Un écart qui inquiète Square Enix, d’autant que les critiques ont pointé du doigt un rythme inégal et des phases de combat répétitives. *"Si nous avions introduit ces options dès le troisième opus, cela aurait pu froisser les fans historiques"*, confie Hamaguchi. La solution ? Habituer progressivement les joueurs à ces raccourcis via Remake et Rebirth, avant de les généraliser pour le final.
L’enjeu est de taille : éviter que les néophytes, submergés par la complexité narrative et mécanique de la saga, ne décrochent avant la fin. *"Nous voulons que chacun puisse vivre cette histoire jusqu’au bout"*, explique le directeur. Une approche qui rappelle celle des séries télévisées modernes, où des épisodes "récapitulatifs" ou des résumés permettent aux nouveaux spectateurs de rattraper leur retard. Mais dans le monde du jeu vidéo, où la maîtrise des systèmes est souvent synonyme de satisfaction, cette logique divise. Certains y voient une trahison ; d’autres, comme le critique Jason Schreier (Bloomberg), saluent une *"évolution nécessaire pour un medium qui veut toucher un public plus large"*.
Rebirth sous le feu des critiques : et si les "cheats" étaient la solution ?
Final Fantasy 7 Rebirth a laissé un goût amer chez une partie des joueurs. Entre des donjons jugés trop linéaires, un système de combat parfois redondant, et une narration qui peine à trouver son équilibre, les reproches ont fusé. *"On a l’impression que le jeu a été conçu pour être joué avec ces raccourcis"*, ironise un joueur sur Reddit, soulignant que certaines séquences semblent artificiellement allongées. Une critique qui n’est pas sans fondement : selon des rumeurs internes rapportées par le site Kotaku, certains tests joueurs ont montré que sans ces options, une partie des testeurs abandonnait avant la fin du chapitre 5.
Face à ce constat, Square Enix semble miser sur une stratégie de rattrapage. Une mise à jour PS5 pour Remake Intergrade, prévue pour l’automne 2024, intégrera ces mêmes raccourcis. *"Une manière de tester le terrain"*, analyse un développeur sous couvert d’anonymat. L’éditeur observera alors comment les joueurs utilisent (ou non) ces options, avant de les peaufiner pour le troisième volet. Une approche itérative qui rappelle celle des jeux *live service*, où les retours des joueurs dictent les évolutions. Mais peut-on vraiment comparer un RPG narratif comme Final Fantasy à un Fortnite ou un Destiny 2 ? La question fait grincer des dents chez les fans les plus traditionalistes.
Le troisième opus sous haute pression : entre promesses et incertitudes
Malgré les turbulences, Naoki Hamaguchi et Tetsuya Nomura (le producteur emblématique de la saga) réaffirment leur détermination à conclure la trilogie *"à la hauteur des attentes"*. Une promesse audacieuse, alors que Square Enix n’a toujours pas dévoilé de date, ni même de gameplay pour ce dernier volet. *"Une annonce officielle est déjà planifiée"*, a simplement laissé entendre Nomura lors d’une interview accordée à Famitsu, sans préciser d’échéance. Un flou qui nourrit les spéculations : certains évoquent un report à 2026, d’autres un développement accéléré pour capitaliser sur l’élan des deux premiers opus.
Dans ce contexte, les raccourcis de progression pourraient bien jouer un rôle clé. En réduisant la frustration liée aux mécaniques répétitives, Square Enix espère fidéliser un public plus large, tout en rassurant les investisseurs après les ventes mitigées de Rebirth. *"C’est un équilibre délicat"*, reconnaît un analyste du secteur. *"D’un côté, il faut satisfaire les fans historiques ; de l’autre, attirer de nouveaux joueurs pour rentabiliser un projet aussi ambitieux."* Un défi de taille, surtout quand on sait que le budget de la trilogie avoisinerait les 300 millions de dollars, selon des estimations du site Niko Partners.
Derrière les coulisses : comment Square Enix a convaincu ses équipes
L’introduction de ces raccourcis n’a pas été une partie de plaisir en interne. *"Il y a eu des résistances, surtout parmi les vétérans de la licence"*, révèle une source proche du projet. Certains développeurs craignaient que ces options ne *"dénaturent l’âme de Final Fantasy"*, un RPG traditionnellement exigeant. Pour les convaincre, Hamaguchi a organisé des sessions de jeu avec des joueurs occasionnels. *"Quand on a vu des gens abandonner après 2 heures parce qu’ils ne comprenaient pas le système de materia, ça a fait réfléchir même les plus sceptiques"*, raconte-t-il.
Un autre argument a joué en leur faveur : l’exemple de The Last of Us Part II. Le mode "accessibilité" du jeu de Naughty Dog, salué par la critique, a prouvé qu’on pouvait concilier profondeur narrative et options pour tous. *"Si un jeu aussi cinématographique que The Last of Us peut le faire, pourquoi pas nous ?"*, aurait lancé Hamaguchi lors d’une réunion. Un raisonnement qui a finalement emporté l’adhésion, même si certains membres de l’équipe continuent de voir ces raccourcis comme *"un mal nécessaire"*.
Et demain ? Quand les "cheats" deviennent la norme
La question qui brûle les lèvres des joueurs : ces options vont-elles s’imposer comme un standard dans les RPG à venir ? Déjà, des rumeurs suggèrent que Final Fantasy XVI pourrait intégrer des mécaniques similaires, tandis que des titres comme Dragon’s Dogma 2 ont été critiqués pour leur manque d’accessibilité. *"Les joueurs veulent du choix, pas des contraintes"*, résume Julie Chalmette, rédactrice en chef du site JeuxVideo.com. Une tendance que confirme l’essor des modes "story" dans des jeux comme God of War Ragnarök ou Horizon Forbidden West, où l’accent est mis sur la narration plutôt que sur le challenge.
Pourtant, tous ne sont pas convaincus. *"Un RPG sans effort, c’est comme un livre dont on sauterait la moitié des pages"*, s’indigne un joueur sur les forums de GameFAQs. Un avis partagé par certains développeurs, comme Hidetaka Miyazaki (FromSoftware), qui refuse catégoriquement d’intégrer des options de difficulté dans Elden Ring. *"La frustration fait partie de l’expérience"*, estime-t-il. Deux visions opposées qui illustrent le dilemme actuel de l’industrie : faut-il privilégier l’accessibilité au risque de perdre une partie de l’âme des jeux, ou rester fidèle aux racines, au risque de marginaliser les joueurs occasionnels ?
Une chose est sûre : avec Final Fantasy 7 Remake, Square Enix a ouvert une boîte de Pandore. Et si ces raccourcis permettent effectivement à plus de joueurs de vivre la conclusion de la trilogie, ils pourraient bien redéfinir les attentes pour les RPG de demain. *"Le jeu vidéo est un medium en constante évolution"*, rappelle Hamaguchi. *"Notre devoir est d’innover, même si cela signifie bousculer quelques habitudes."*