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Guillermo del Toro :
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Il y a 1 jour

Guillermo del Toro :

Pourquoi Pacific Rim, le film de mechas de Guillermo del Toro, reste un ovni dans le paysage du blockbuster moderne ?

En 2013, le réalisateur mexicain, habitué aux univers sombres et poétiques, se lance dans un projet démesuré : un hommage flamboyant aux kaijū eiga japonais, mêlant robots géants et créatures extraterrestres. Avec un budget pharaonique et une vision artistique unique, Pacific Rim défie les codes du cinéma d'action hollywoodien. Entre chorégraphies mécaniques et personnages profondément humains, le film, désormais disponible sur Netflix, continue de fasciner par son audace visuelle et son équilibre rare entre spectacle et émotion.

A retenir :

  • Un pari audacieux : Del Toro quitte son univers gothique pour un blockbuster de science-fiction pure, avec un budget de 180 millions de dollars.
  • Un hommage assumé aux films de monstres japonais (Godzilla, Neon Genesis Evangelion), tout en innovant avec des combats chorégraphiés comme des "ballets industriels".
  • Un casting surprise : Charlie Hunnam, Rinko Kikuchi (dans un rôle féminin marquant) et Idris Elba forment un trio inattendu, soutenu par Ron Perlman et Charlie Day.
  • Une réception contrastée : 72 % sur Rotten Tomatoes, mais un culte immédiat pour les fans, menant à une suite (Pacific Rim: Uprising) et une série animée (Pacific Rim: The Black).
  • Une patte visuelle inégalée : Del Toro prouve qu’il maîtrise aussi bien les créatures lovecraftiennes que les batailles titanesques, avec une attention rare aux détails émotionnels.

Del Toro et la science-fiction : quand le poète des monstres dompte les mechas

Guillermo del Toro a bâti sa réputation sur des œuvres où le fantastique côtoie le gothique, des films comme Le Labyrinthe de Pan (2006) ou La Forme de l’eau (2017), où la poésie le dispute à l’horreur. Pourtant, en 2013, le réalisateur mexicain prend un virage inattendu avec Pacific Rim, un blockbuster de science-fiction pure, loin de ses thèmes habituels. Le défi ? Transposer son amour des créatures et des univers oniriques dans un cadre futuriste, où des robots de 80 mètres, les Jaegers, affrontent des monstres extraterrestres, les Kaijūs.

Ce qui frappe dès les premières minutes, c’est la cohérence visuelle du film. Del Toro, passionné de kaijū eiga (ces films japonais de monstres géants popularisés par Godzilla dans les années 1950) et d’anime comme Neon Genesis Evangelion, puise dans ces influences sans jamais tomber dans la copie. Les Jaegers, avec leurs designs industriels et leurs mouvements lourds mais précis, semblent tout droit sortis d’un croquis de mecha des années 1980, tandis que les Kaijūs, aux formes organiques et grotesques, rappellent ses créatures fétiches, comme celles de Hellboy.

Pourtant, Pacific Rim n’est pas qu’un exercice de style. Del Toro y injecte une dimension humaine rare dans les blockbusters. Les pilotes des Jaegers, liés par un système neuronal appelé Drift, partagent leurs souvenirs et leurs émotions, créant une intimité inattendue au milieu du chaos. Une idée qui permet au réalisateur d’explorer des thèmes chers à son cœur : la vulnérabilité, la résilience, et la connexion entre les êtres.


À sa sortie, le film divise. Certains critiques lui reprochent un scénario trop simple ou un manque de subtilité, tandis que d’autres, comme Peter Travers de Rolling Stone, saluent son "audace visuelle et son cœur battant". Avec 72 % sur Rotten Tomatoes, Pacific Rim n’est pas un chef-d’œuvre unanimement acclamé, mais il devient rapidement culte pour une génération de spectateurs en quête d’originalité. Preuve de son impact : une suite, Pacific Rim: Uprising (2018), et une série animée, Pacific Rim: The Black (2021), qui étendent l’univers sans jamais égaler la magie du premier opus.

Des combats chorégraphiés comme des ballets mécaniques

Là où Pacific Rim se distingue radicalement de ses concurrents – pensons aux Transformers de Michael Bay –, c’est dans sa mise en scène des combats. Del Toro, aidé par le directeur de la photographie Guillermo Navarro, filme les affrontements entre Jaegers et Kaijūs comme des duels chorégraphiés, presque des ballets. Chaque mouvement est pensé, chaque coup porte une intention, comme dans une scène de kung-fu géante.

Le réalisateur explique d’ailleurs dans les making-of avoir voulu éviter le "shaky cam" (caméra tremblante) et les plans trop rapides, si courants dans les films d’action modernes. Ici, pas de montage frénétique : les séquences sont lisibles, presque théâtrales. Les Jaegers, avec leurs armes improvisées (un cargo transformé en massue, un épée géante forgée dans le feu), rappellent les héros des films de samouraïs, tandis que les Kaijūs, avec leurs attaques brutales et imprévisibles, incarnent le chaos pur.

Un choix risqué, mais payant. Les fans de mechas et de kaijū y voient enfin un film qui prend le temps de célébrer la mécanique et la physicalité des combats, sans sacrifier l’émotion. La scène où Raleigh Becket (Charlie Hunnam) et Mako Mori (Rinko Kikuchi) pilotent ensemble le Jaeger Gipsy Danger pour la première fois, synchronisant leurs mouvements comme des danseurs, est devenue iconique. Une séquence qui résume à elle seule l’ambition du film : allier la démesure du spectacle à l’intimité des personnages.

"Nous sommes la résistance" : un casting qui porte l’épopée

Si Pacific Rim marque les esprits, c’est aussi grâce à son casting éclectique, où chaque acteur apporte une touche unique à cet univers déjanté. En tête d’affiche, Charlie Hunnam, alors star de la série Sons of Anarchy, incarne Raleigh Becket, un pilote au passé douloureux. Son jeu, entre rudesse et sensibilité, évite le cliché du héros invincible. Face à lui, Rinko Kikuchi (oscarisée pour Babel en 2007) vole presque la vedette en Mako Mori, un personnage féminin complexe et déterminé, loin des stéréotypes de la "demoiselle en détresse".

Autour d’eux, Idris Elba impose sa présence en Stacker Pentecost, le commandant charismatique dont les discours enflammés ("We are canceling the apocalypse!") sont devenus cultes. Le réalisateur a d’ailleurs avoué avoir écrit le rôle en pensant à l’acteur britannique, connu pour son aura naturelle. Plus inattendu, Charlie Day (de Always Sunny in Philadelphia) surprend en Newt Geiszler, un scientifique excentrique et drôle, qui apporte une touche de légèreté bienvenue.

Del Toro fidélise aussi ses collaborateurs de toujours : Ron Perlman, inoubliable dans Hellboy, campe ici un trafiquant de pièces de Jaegers au grand cœur, tandis que Burn Gorman (vu dans The Dark Knight Rises) incarne un savant ambigu, entre génie et lâcheté. Cette alchimie entre acteurs, certains issus du drame, d’autres de la comédie, donne au film une richesse humaine rare dans les blockbusters, où les personnages sont souvent sacrifiés au profit des effets spéciaux.

Derrière les écrans : le tour de force technique de Pacific Rim

Realiser Pacific Rim a été un défi technique colossal. Del Toro, perfectionniste, a insisté pour que les Jaegers et les Kaijūs soient conçus avec un réalisme poussé, jusqu’aux moindres détails mécaniques. Les robots, par exemple, ont été imaginés comme des "cathédrales industrielles", avec des systèmes de refroidissement visibles, des câbles apparents, et des mouvements qui tiennent compte de leur poids (un Jaeger pèse environ 2 000 tonnes !).

Pour les créatures, le réalisateur s’est inspiré de la biologie marine et des céphalopodes, donnant aux Kaijūs des allures à la fois familières et alien. Le design de Knifehead, le premier monstre affronté dans le film, mêle ainsi des traits de requin, de lézard et de pieuvre, le tout dans une silhouette élancée et mortelle. Del Toro a même travaillé avec des paléontologues pour imaginer comment ces créatures pourraient évoluer et se déplacer dans l’eau ou sur terre.

Côté tournage, le film a nécessité plus de 600 effets visuels, réalisés par Industrial Light & Magic (la société fondée par George Lucas). Les scènes sous-marines, notamment, ont demandé des mois de travail pour recréer la pression de l’eau, les reflets, et les mouvements des Jaegers dans un environnement hostile. Un effort qui paie : aujourd’hui encore, les combats sous l’océan Pacifique, baignés d’une lumière bleutée et menaçante, comptent parmi les séquences les plus mémorables du film.

Un héritage durable : pourquoi Pacific Rim reste incontournable

Presque dix ans après sa sortie, Pacific Rim continue de fasciner. D’abord parce qu’il représente un ovni dans la filmographie de Del Toro : un blockbuster grand public, mais porteur de sa signature visuelle et de ses obsessions (les monstres, la résilience, la beauté dans le chaos). Ensuite, parce qu’il a réinventé les codes du film de mechas pour le public occidental, en prouvant qu’on pouvait allier spectacle pur et profondeur narrative.

Son influence se voit aujourd’hui dans des œuvres comme Godzilla vs. Kong (2021) ou la série Titan (2018), qui reprennent l’idée de combats titanesques filmés avec une certaine solennité. Même le jeu vidéo Daemon X Machina (2019) doit beaucoup à l’esthétique de Pacific Rim, avec ses mechas customisables et ses environnements post-apocalyptiques.

Enfin, le film a marqué les esprits par son optimisme en plein essor des cinémas dystopiques. Là où des films comme The Hunger Games ou Divergent dépeignaient des futurs sombres, Pacific Rim mise sur l’unité et la coopération pour sauver l’humanité. Un message qui résonne particulièrement en 2023, à l’ère des crises globales. Comme le dit Stacker Pentecost : "Nous sommes la résistance." Une phrase qui, aujourd’hui, semble plus actuelle que jamais.

Disponible depuis peu sur Netflix, Pacific Rim mérite une redécouverte. Non pas comme un simple film de robots géants, mais comme une œuvre hybride, où la folie créative de Del Toro rencontre l’exigence du blockbuster. Entre hommages assumés et innovations audacieuses, le film prouve qu’un cinéma spectaculaire peut aussi être intelligent, émotionnel, et visuellement révolutionnaire.

Et si la suite et la série animée n’ont pas tout à fait capturé la magie de l’original, elles témoignent d’une chose : Pacific Rim a marqué durablement la culture pop. Alors, prêt à replonger dans la Drift ?

L'Avis de la rédaction
Par Celtic
"Del Toro a réussi à transformer un blockbuster en un poème visuel, où les Jaegers dansent avec les Kaijūs. Un film qui prouve que même les monstres peuvent avoir un cœur."
Article rédigé par SkimAI
Révisé et complété par Celtic

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