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Horses : Le jeu d’horreur psychologique censuré par Steam qui met en péril son studio
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Il y a 1 jour

Horses : Le jeu d’horreur psychologique censuré par Steam qui met en péril son studio

Un jeu d’horreur psychologique censuré sans explication claire, une survie en jeu.

Horses, le titre audacieux du studio italien Santa Ragione, se retrouve au cœur d’une polémique après son exclusion inexpliquée de Steam. Malgré des thèmes sombres mais légaux (trauma familial, dynamiques de pouvoir) et une validation sur Epic Games, GOG et Itch.io, Valve maintient son veto, plongeant le studio dans une crise financière. Entre opacité algorithmique et monopole des plateformes, ce cas révèle les failles d’un système où l’art vidéo se heurte à des règles arbitraires.

A retenir :

  • Horses, jeu d’horreur psychologique interdit sur Steam malgré un contenu légal (PEGI 18), suscite l’incompréhension.
  • Santa Ragione dénonce l’opacité de Valve : accusations infondées de "comportements sexuels impliquant des mineurs" malgré des personnages majeurs et des corrections apportées.
  • L’exclusion menace la survie du studio, déjà fragilisé, avec 75 % de visibilité en moins sans Steam.
  • Un débat sur la censure algorithmique : Steam autorise des jeux hentai ou ultra-violents, mais rejette un projet artistique non pornographique.
  • Le studio critique un "monopole de fait" qui étouffe les indés, malgré un palmarès récompensé (ex. Mediterranea Inferno, lauréat à l’IGF 2024).

Un jeu qui dérange : entre métaphore glaçante et censure inexpliquée

Imaginez un monde où des humains, réduits à l’état d’animaux, subissent humiliation et violence sous les traits de chevaux anthropomorphes. Voici le cœur de Horses, le nouveau jeu d’horreur psychologique de Santa Ragione, prévu pour le 2 décembre 2025 sur Epic Games, GOG et Itch.io. Une œuvre qui explore les traumatismes familiaux et les dynamiques de pouvoir toxiques, le tout enveloppé dans une esthétique onirique et dérangeante. Pourtant, malgré son approche artistique et l’absence de contenu illégal, Valve a décidé de l’exclure de Steam… sans jamais fournir d’explications claires.

Le studio italien, connu pour des titres comme Saturnalia ou Mediterranea Inferno (lauréat à l’Independent Games Festival 2024), se retrouve ainsi plongé dans une bataille inattendue. "Nous avons passé deux ans à essayer de comprendre, à ajuster le jeu, mais Steam reste sourd à nos arguments", confie Pietro Righi Riva, cofondateur de Santa Ragione. Le problème ? Une scène jugée ambiguë – une jeune fille juchée sur les épaules d’une femme nue – a été révisée pour éviter tout malentendu. Peu importe : le verdict est tombé, sans appel.

La raison officielle invoquée par Valve ? Des "comportements sexuels impliquant des mineurs". Une accusation que le studio rejette catégoriquement : "Tous nos personnages ont plus de 20 ans, et le jeu ne contient aucune scène de nature pornographique". Alors, pourquoi un tel acharnement ? La question reste sans réponse, d’autant que d’autres plateformes, comme GOG ou Epic Games, ont validé le titre après des ajustements mineurs. "Steam héberge des jeux bien plus explicites, des hentai ou des FPS ultra-violents comme Hotline Miami… Mais nous, on nous censure pour une métaphore artistique ?", s’interroge Riva.


Le paradoxe est frappant : Horses est classé PEGI 18 et ESRB M (pour "Mature"), soit les certifications les plus strictes en matière de contenu adulte. Pourtant, là où des titres comme House Party (accusé de sexualisation des personnages féminins) ou Rape Day (un jeu controversé sur le viol, finalement retiré) ont pu circuler un temps sur Steam, Horses se voit interdit sans possibilité de recours. "On nous demande de prouver une négative : comment démontrer qu’un jeu ne contient pas quelque chose qu’il n’a jamais eu ?", s’exaspère le développeur.

"Sans Steam, c’est la mort financière" : un studio au bord du précipice

Pour un petit studio indépendant, une exclusion de Steam équivaut à une condamnation à mort. "C’est comme si un film était interdit dans toutes les salles de cinéma, mais autorisé en DVD… Sauf que 90 % des spectateurs vont au cinéma", compare Riva. Les chiffres sont implacables : 75 % des joueurs PC utilisent Steam comme plateforme principale. Sans elle, un jeu perd une partie majeure de son public potentiel.

Santa Ragione avait investi 50 000 dollars dans Horses, un budget colossal pour un studio de sa taille. Après l’annonce de l’interdiction, les partenaires financiers se sont rétractés, forçant l’équipe à puiser dans ses fonds personnels pour finaliser le développement. "On est dans une situation complètement insoutenable. Soit le jeu se vend à plusieurs dizaines de milliers d’exemplaires sur les autres plateformes, soit on ferme boutique", confie Riva, amer. Un pari risqué, quand on sait que même des succès critiques comme Saturnalia ont peiné à trouver leur public.

Le studio mise désormais sur une stratégie agressive de communication et sur le bouche-à-oreille. Une campagne de précommandes a été lancée sur Epic Games, avec des bonus exclusifs pour les premiers acheteurs. "On espère que les joueurs comprendront l’enjeu : si Horses échoue, c’est toute une vision de l’art vidéo qui disparaît", explique le développeur. Mais sans la visibilité de Steam, chaque vente sera une bataille.

L’art vidéo sous le joug des algorithmes : quand la créativité se heurte aux règles opaques

Horses n’est pas un cas isolé. Il cristallise un débat bien plus large : celui de la censure algorithmique et de son impact sur la création indépendante. Valve, qui se targue de défendre la liberté artistique, applique en réalité des critères flous, voire contradictoires. "Ils disent vouloir encourager la diversité, mais en pratique, ils étouffent tout ce qui sort des sentiers battus", dénonce un développeur anonyme, contacté par nos soins.

Le problème ? Steam fonctionne comme un juge sans appel. Aucun processus de recours transparent, aucune possibilité de dialoguer avec les modérateurs. "On envoie des mails, on attend des mois, et au final, on reçoit un ‘non’ sans justification. C’est comme se battre contre un mur", résume Riva. Pire : les règles semblent appliquées de manière inégale. Pourquoi Horses est-il interdit alors que des jeux comme Negligee (un visual novel érotique) ou Do Not Feed the Monkeys (qui aborde des thèmes comme le voyeurisme) restent disponibles ?

Certains observateurs pointent du doigt un biais culturel. "Steam est une entreprise américaine, avec des normes puritaines sur certains sujets. En Europe, on a une approche différente de la nudité ou de la violence symbolique", analyse Marie-Laure Ryan, chercheuse en narratologie des jeux vidéo. Une hypothèse qui expliquerait pourquoi des titres japonais ou européens, plus audacieux dans leur traitement des thèmes adultes, se heurtent souvent à des refus.

"Derrière la métaphore du cheval, une critique sociale bien réelle"

Pour comprendre pourquoi Horses dérange autant, il faut plonger dans son univers. Le jeu met en scène des humains déguisés en chevaux, soumis à des rituels humiliants dans ce qui ressemble à un culte sectaire. Une métaphore glaçante des dynamiques familiales toxiques, où les personnages sont réduits à l’état d’objets, privés de toute autonomie. "C’est une réflexion sur le pouvoir, la soumission et la façon dont les traumatismes se transmettent de génération en génération", explique Riva.

Inspiré par des œuvres comme The Witcher 3 (pour son traitement de la folie) ou Silent Hill 2 (pour son horreur psychologique), Horses pousse le joueur à remettre en question sa propre complicité. "Vous incarnez tour à tour la victime et le bourreau. Le jeu vous force à vous demander : jusqu’où seriez-vous prêt à aller pour survivre dans ce système ?" Une approche qui rappelle Disco Elysium, où la narration brouille les frontières entre bien et mal.

Pourtant, c’est précisément cette ambiguïté morale qui semble poser problème à Valve. "Ils veulent des jeux où tout est clair : les méchants sont méchants, les gentils sont gentils. Dès qu’on sort de ce schéma, ils paniquent", ironise Riva. Une critique partagée par Jasper Byrne, créateur de Lone Survivor : "Les plateformes comme Steam aiment se présenter comme des défenseurs de l’innovation, mais en réalité, elles favorisent les produits standardisés, faciles à vendre."

Et si Steam n’était plus le refuge des indés ?

L’affaire Horses soulève une question cruciale : Steam est-il encore un espace sûr pour les développeurs indépendants ? Longtemps considérée comme la plateforme la plus ouverte, Valve semble aujourd’hui privilégier la rentabilité et la standardisation au détriment de la prise de risque artistique. "Avant, Steam était le Far West du jeu vidéo. Maintenant, c’est devenu un centre commercial où tout doit être lisse et prévisible", résume un éditeur sous couvert d’anonymat.

Les alternatives existent, mais elles restent marginales. Epic Games et GOG offrent une visibilité limitée, tandis que Itch.io, bien que très ouvert, ne touche qu’un public de niche. "Sans Steam, on est condamnés à rester dans l’ombre", regrette Riva. Certains studios se tournent vers des modèles hybrides, combinant ventes directes (via leur site web) et abonnements (comme sur Patreon), mais ces solutions demandent un investissement colossal en marketing.

Face à ce constat, une question se pose : faut-il réguler les plateformes comme Steam ? Certains pays européens, comme la France ou l’Allemagne, commencent à s’intéresser à la question. "On ne peut plus laisser une poignée d’entreprises décider arbitrairement du sort de milliers de créateurs", estime Lucie Soullier, avocate spécialisée dans le droit du numérique. Une piste ? La création d’un organisme indépendant de médiation, qui pourrait examiner les cas litigieux et proposer des solutions équitables.

En attendant, Santa Ragione se bat pour survivre. Le studio a lancé une campagne de financement participatif sur Kickstarter, avec des contreparties exclusives (artbooks, accès bêta, etc.). "Si Horses échoue, ce ne sera pas juste la fin d’un jeu. Ce sera la preuve que notre industrie n’a plus de place pour les voix dissonantes", conclut Riva, déterminé. Une bataille qui dépasse désormais le cadre d’un simple jeu vidéo.

Le 2 décembre 2025, Horses sortira sur Epic Games, GOG et Itch.io, mais son avenir reste incertain. Entre un Steam devenu juge et partie, des règles opaques et un monopole écrasant, le jeu de Santa Ragione incarne les défis d’une industrie où l’art doit désormais composer avec les algorithmes. Son succès – ou son échec – enverra un message clair aux développeurs : jusqu’où peut-on pousser la créativité sans risquer l’effacement ?

Pour les joueurs, le choix est simple : soutenir un titre audacieux, ou laisser les plateformes décider à leur place. Dans un monde où 75 % des ventes PC passent par Steam, chaque achat hors de son écosystème devient un acte de résistance. Horses n’est plus qu’un jeu. C’est un test pour l’avenir du jeu vidéo indépendant.

L'Avis de la rédaction
Par Nakmen
Horses, c'est un peu comme si Valve avait décidé de censurer un film de David Lynch pour une scène de nudité. C'est absurde et injuste.
Article rédigé par SkimAI
Révisé et complété par Nakmen

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