Life is Strange : L’adaptation Amazon sans DONTNOD – Un pari risqué ou une trahison annoncée ?

L’absence qui fait scandale : *Life is Strange* orphelin de ses pères

Imaginez *Stranger Things* sans les frères Duffer, ou *The Witcher* sans Andrzej Sapkowski. C’est pourtant le scénario qui se dessine pour *Life is Strange*, dont l’adaptation télévisée, annoncée par **Amazon MGM Studios** et **Square Enix**, se passera des artisans du jeu original. **DONTNOD Entertainment**, le studio français derrière le phénomène de **2015**, n’est pas impliqué. Pire : ses figures emblématiques, **Michel Koch** (directeur créatif) et **Raoul Barbet** (réalisateur), brillent par leur absence. Un détail qui, pour les fans, ressemble à une **amputation**.

À la place, c’est **LuckyChap** – la société de production de **Margot Robbie** – et **Story Kitchen**, spécialisée dans l’adaptation d’IP *"non conventionnelles"*, qui pilotent le projet. Un choix stratégique, certes, mais qui sonne comme un **aveu d’échec** pour certains. *"Square Enix a préféré miser sur des noms bankables plutôt que sur ceux qui ont créé l’univers"*, déplore un joueur sur le forum ResetEra. D’autant que le géant japonais a déjà **écarté DONTNOD** des suites récentes (*Life is Strange: True Colors*), confiant les rênes à **Deck Nine Games** – un studio américain au style plus grand public.

La question brûle les lèvres : **peut-on adapter *Life is Strange* sans ses créateurs ?** Le jeu, salué pour son **récit émotionnel**, ses **dilemmes moraux** et son **atmosphère envoûtante**, doit une grande partie de son succès à des détails presque imperceptibles – les silences de **Max Caulfield**, les éclats de rire de **Chloe Price**, ou cette lumière dorée qui baigne **Arcadia Bay** comme un souvenir flou. *"C’est comme si on refaisait *The Last of Us* sans Neil Druckmann"*, compare un critique sur Twitter. **Le risque ? Une série vide de son âme.**

"Ils ont 10 ans de lore à respecter" : la pression des fans

La communauté de *Life is Strange* est l’une des plus **engagées** – et des plus **exigeantes**. Sur Reddit, les discussions s’enchaînent : *"Sans la BO de Jonathan Morali, sans les choix qui comptent, à quoi bon ?"*, s’interroge un utilisateur. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : selon une étude de **Square Enix** en 2021, **63 % des joueurs** avaient choisi de **sauver Chloe** plutôt qu’Arcadia Bay dans le premier opus – un détail symbolique qui montre à quel point les **décisions narratives** sont ancrées dans la culture du jeu.

Or, transposer cette **interactivité** à l’écran relève du **défis herculéen**. Deux options s’offrent à **Charlie Covell**, la showrunner désignée :

• Une version linéaire : Risque de **trahir l’essence** du jeu en imposant une seule fin, au mépris des **multiples bifurcations** qui ont marqué les joueurs.
• Une approche innovante : Comme des **épisodes alternatifs** (à la *Bandersnatch*), mais avec un coût de production **pharaonique** et une logistique complexe.

*"Si ils zappent les conséquences des choix, ça devient une simple série ado, pas *Life is Strange*"*, prévient un modérateur du subreddit dédié. D’autant que Covell, connue pour son **ton acide** dans *The End of the F***ing World*, devra composer avec un univers où la **mélancolie** et la **poésie** priment sur le cynisme.

Autre écueil : **l’ambiance sonore**. La bande originale du jeu, signée **Jonathan Morali** (Phoenix) et ponctuée de titres de **José González**, **Angus & Julia Stone** ou **Sparklehorse**, était bien plus qu’un fond musical – c’était **le cœur battant d’Arcadia Bay**. *"Sans *Obstacles* de Syd Matters pendant la scène du phare, c’est comme si on retirait l’âme du jeu"*, s’alarme un fan. Un défi de taille pour Covell, dont les précédents travaux misaient davantage sur des **silences pesants** que sur des **mélodies envoûtantes**.

Derrière les coulisses : pourquoi Square Enix a lâché DONTNOD

Pour comprendre cette **exclusion**, il faut remonter à **2018**, lorsque *Life is Strange 2* sort dans un **climat tendu**. Le jeu, bien que techniquement abouti, divise : certains lui reprochent un **scénario moins percutant**, d’autres un **départ des thèmes féminins** qui avaient fait le succès du premier opus. **Square Enix**, sous pression pour rentabiliser la licence, décide alors de **diversifier les studios** :

• Deck Nine Games (*Before the Storm*, *True Colors*) prend le relais pour des spin-offs plus **accessibles**.
• DONTNOD se voit confier *Tell Me Why*, un autre jeu narratif, mais **hors de l’univers *Life is Strange***.

*"C’était une question de contrôle créatif et de rentabilité"*, explique un ancien employé de Square Enix sous couvert d’anonymat. **"DONTNOD avait une vision très auteuriste, pas toujours compatible avec les attentes commerciales."**

Résultat : quand Amazon frappe à la porte pour une adaptation, **Square Enix** opte pour des partenaires **plus "Hollywood"**, capables de garantir un **succès mainstream**. *"Ils veulent une série qui plaise au grand public, pas aux puristes"*, résume un analyste du secteur. Un pari risqué, quand on sait que les **adaptations de jeux vidéo** ont souvent déchiré les fans (*Halo*, *The Last of Us* faisant figure d’exceptions).

**Et DONTNOD dans tout ça ?** Le studio français, contacté par JeuxVideo.com, a refusé de commenter, se contentant d’un laconique : *"Nous sommes fiers de ce que nous avons créé, et nous suivrons ce projet avec intérêt."* Une réponse qui en dit long sur les **tensions persistantes**.

2024, l’année de tous les dangers : entre espoir et backlash annoncé

Les premiers **teasers** sont attendus pour **fin 2024**, avec une sortie probable en **2025**. D’ici là, les spéculations vont bon train. Certains imaginent déjà une **série anthologique**, explorant chaque opus du jeu (le premier en 2015, *Before the Storm*, *True Colors*…). D’autres, plus pessimistes, craignent un **reboot édulcoré**, où **Max et Chloe** ne seraient que des archétypes de séries adolescentes.

**"Soit ils nous surprennent, soit ils se plantent. Il n’y a pas de milieu avec *Life is Strange*"**, résume un streamer spécialisé. Les exemples ne manquent pas :

• Le succès : *The Last of Us* (HBO) a prouvé qu’une adaptation fidèle pouvait **transcender** le matériel original.
• L’échec : *Halo* (Paramount+) a déçu en **gommant** ce qui faisait l’identité du jeu.

**Où se situera Amazon ?** Tout dépendra de trois éléments clés :

1. Le respect des choix : Les fans veulent voir **leurs décisions** reflétées à l’écran, même sous une forme narrative.
2. L’atmosphère : **Arcadia Bay** doit rester ce mélange de **nostalgie**, de **mystère** et de **désespoir poétique**.
3. La bande-son : Sans les **morceaux cultes**, la série perdra une partie de son **pouvoir émotionnel**.

**Un dernier détail intrigue** : selon Variety, **Eleanor Tomlinson** (*Poldark*) serait en pourparlers pour incarner **Max Caulfield**. Un choix qui, s’il se confirme, pourrait **apaiser** les fans – à condition que le scénario lui donne **la profondeur** du personnage original. *"Si elle arrive à capturer cette vulnérabilité, cette façon de parler comme si chaque mot était une hésitation… alors peut-être qu’on a une chance"*, espère une joueuse sur Discord.

En attendant, une chose est sûre : **cette adaptation sera scrutée comme aucune autre**. Entre **hommage** et **trahison**, entre **fidélité** et **réinvention**, Amazon et Square Enix marchent sur un fil. Et les fans, eux, ont déjà **leurs torches et leurs fourches** prêtes.