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NBA Jam : Comment Tim Kitzrow, la voix mythique du jeu, a été lésé malgré un succès planétaire
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Il y a 23 heures

NBA Jam : Comment Tim Kitzrow, la voix mythique du jeu, a été lésé malgré un succès planétaire

Derrière les répliques cultes de NBA Jam, une réalité amère : Tim Kitzrow, la voix inoubliable du jeu, n’a perçu que 50 dollars de l’heure pour le premier opus en 1993. Malgré un héritage qui traverse les décennies – des "Boomshakalaka!" aux hommages dans Space Jam: A New Legacy – son histoire révèle les déséquilibres criants entre talents et éditeurs dans le gaming des années 90. Un cas d’école sur la valorisation (ou l’absence de) des voix off, alors que la franchise a généré plus d’un milliard de dollars.

A retenir :

  • 50 dollars de l’heure : le salaire initial de Tim Kitzrow pour NBA Jam (1993), identique à ses enregistrements... de machines à flipper.
  • "Boomshakalaka!" et autres répliques cultes sont devenues des phénomènes culturels, citées jusqu’à Space Jam: A New Legacy (2021).
  • Un contrat renégocié après le succès, mais aucune royalty malgré plus d’un milliard de dollars de revenus pour la franchise.
  • Son style unique (humour déjanté + énergie survoltée) inspire encore aujourd’hui, comme dans Mutant Football League 2 (2024).
  • Un symbole des injustices contractuelles des années 90 : des talents sous-payés face à des éditeurs millionnaires.
  • Comparaison frappante : son salaire horaire équivalait à celui... d’un employé de fast-food à l’époque.

"He’s on fire!" – Quand une voix devient légendaire... pour 50 dollars de l’heure

Imaginez un instant : vous incarnez la voix d’un jeu qui va marquer toute une génération, un titre si culte que ses répliques seront reprises pendant 30 ans. Maintenant, imaginez que pour ce travail, on vous paie... comme un employé de McDonald’s. C’est pourtant l’histoire vraie de Tim Kitzrow, le commentateur survolté de NBA Jam, dont les "Boomshakalaka!" et "Is it the shoes?!" sont devenus des icônes de la pop culture.

En 1993, lorsque Midway sort le premier NBA Jam en arcade, le jeu est une révolution : des matchs à 2 contre 2, des dunks impossibles, et surtout, une voix off hystérique qui commente chaque action comme si le destin de l’humanité en dépendait. Problème ? Pour enregistrer ces centaines de répliques, Kitzrow touche 50 dollars de l’heure – le même tarif que pour ses précédents travaux... sur des machines à flipper. Un montant qui, même à l’époque, était ridiculement bas pour un projet aussi ambitieux.

Pire : malgré le succès immédiat du jeu (plus de 20 000 bornes d’arcade vendues en quelques mois), Kitzrow ne touche aucune royalty. Pas un centime sur les millions de cartouches vendues ensuite sur console, ni sur les rééditions ou les merchandising qui ont suivi. Une aberration quand on sait que la franchise NBA Jam a finalement généré plus d’un milliard de dollars de revenus.


À titre de comparaison, en 1993, 50 dollars de l’heure correspondaient à environ 1 000 francs français – soit à peine plus que le salaire minimum (environ 6,40 dollars de l’heure aux États-Unis). Autrement dit, Midway a payé la voix d’un jeu légendaire au tarif... d’un étudiant en job d’été. Une ironie cruelle quand on sait que NBA Jam est devenu l’un des titres les plus rentables de l’histoire de l’arcade.

Le réveil brutal : quand le succès ne rime pas avec justice

Heureusement pour Kitzrow, l’histoire ne s’arrête pas là. Après avoir réalisé l’ampleur du hold-up dont il était victime, il décide de renégocier son contrat pour la suite, NBA Jam Tournament Edition (1994). Cette fois, ses tarifs sont revus à la hausse, et il devient progressivement une valeur sûre pour Midway, prêtant sa voix à d’autres licences sportives déjantées comme NFL Blitz ou MLB Slugfest.

Mais le mal est fait. Dans une interview accordée à Polygon en 2021, Kitzrow avoue avoir été "naïf" : "Je ne connaissais rien à l’industrie du jeu vidéo. Je pensais que 50 dollars de l’heure, c’était correct. Personne ne m’a dit : ‘Hé, ce jeu va cartonner, tu devrais demander plus.’" Une confession qui résume à elle seule les déséquilibres de pouvoir entre les créateurs (souvent indépendants et mal informés) et les éditeurs (des géants comme Midway, Atari ou Electronic Arts).

Son cas n’est d’ailleurs pas isolé. Dans les années 90, les voix off et même les développeurs étaient rarement associés aux profits des jeux. Shigeru Miyamoto (créateur de Mario) touchait un salaire fixe chez Nintendo, sans royalties sur les ventes de Super Mario Bros – un jeu qui a rapporté des milliards. Même schéma pour les acteurs de Mortal Kombat, payés une misère pour des sessions d’enregistrement qui ont fait le tour du monde.


La différence ? Miyamoto est devenu une légende vivante, tandis que Kitzrow, lui, est resté dans l’ombre – malgré un impact culturel énorme. Ses répliques ont été samplées dans des chansons (comme celle du rappeur Lil Uzi Vert), reprises dans des mémes, et même intégrées dans des films comme Space Jam: A New Legacy (2021), où LeBron James cite textuellement un de ses "He’s on fire!". Une ironie de plus : Warner Bros a payé pour utiliser sa voix... mais pas lui.

Boomshakalaka! – L’héritage qui défie le temps (et les contrats)

Aujourd’hui, à 60 ans passés, Tim Kitzrow est toujours actif. En 2024, il prête encore sa voix à Mutant Football League 2, un jeu de football américain aussi déjanté que NBA Jam en son temps. Preuve que son style – un mélange d’humour absurde, de rythme effréné et d’enthousiasme contagieux – n’a pas pris une ride.

Pourtant, malgré cette longévité exceptionnelle, une question persiste : pourquoi un homme dont la voix a généré des fortunes n’a-t-il jamais touché un sou de royalties ? La réponse tient en un mot : les contrats des années 90. À l’époque, les éditeurs imposaient des clauses léonines : paiement à la session, pas de droits sur les ventes, et surtout, aucune transparence sur les revenus futurs.

"On nous faisait signer des papiers sans vraiment expliquer les enjeux", confie Kitzrow. "Personne ne pensait que ces jeux allaient devenir aussi gros. Midway a gagné des centaines de millions, mais moi, j’ai juste touché mon chèque de 50 dollars de l’heure et c’est tout." Un système qui, aujourd’hui, semble inconcevable – surtout à l’ère des streamers et des créateurs de contenu, qui monétisent leur image à outrance.


Pourtant, Kitzrow ne semble pas amer. Dans ses interviews, il insiste sur la chance qu’il a eue de travailler sur des projets aussi marquants. "Je suis reconnaissant que les gens se souviennent encore de moi grâce à NBA Jam. Peu de gens peuvent dire ça." Une philosophie qui contraste avec l’amertume de certains de ses collègues, comme les acteurs de Grand Theft Auto: San Andreas, qui ont poursuivi Rockstar pour utilisation abusive de leur image.

Leçon d’histoire : pourquoi les voix off étaient (et sont parfois encore) les parents pauvres du gaming

L’histoire de Tim Kitzrow n’est pas qu’anecdotique. Elle illustre un problème structurel de l’industrie du jeu vidéo : la sous-valorisation des talents "invisibles". Dans les années 90, les éditeurs considéraient les voix off comme des prestataires interchangeables, et non comme des créateurs à part entière. Résultat : des salaires de misère, pas de droits d’auteur, et une absence totale de reconnaissance dans les crédits (Kitzrow n’apparaît même pas dans ceux de NBA Jam original).

Pire : ce modèle a perduré bien au-delà des années 90. En 2018, les acteurs de Red Dead Redemption 2 ont révélé avoir été payés moins de 1 000 dollars pour des rôles principaux, malgré un budget de développement de 240 millions de dollars. Même combat pour les doubleurs français, souvent rémunérés à la session (entre 200 et 500 euros la journée) sans aucun pourcentage sur les ventes.

Heureusement, les choses évoluent lentement. Depuis les années 2010, les syndicats comme SAG-AFTRA (aux États-Unis) ou l’AFDAS (en France) se battent pour de meilleurs contrats. Certains jeux récents, comme The Last of Us Part II, ont enfin intégré des royalties pour leurs acteurs. Mais pour la majorité des voix off, surtout dans les petits studios, la situation reste précaire.


Alors, la prochaine fois que vous entendrez un "Boomshakalaka!" dans un mème ou un film, souvenez-vous : derrière cette réplique culte, il y a un homme qui a été payé 50 dollars de l’heure pour créer un morceau de l’histoire du jeu vidéo. Une histoire qui, aujourd’hui encore, pose une question simple : qui profite vraiment du succès des jeux ?

Derrière le micro : comment Kitzrow a enregistré les répliques les plus folles de NBA Jam

Saviez-vous que le mythique "Boomshakalaka!" a été improvisé ? Lors des sessions d’enregistrement pour NBA Jam, Tim Kitzrow avait carte blanche pour inventer des répliques. "Les développeurs me disaient juste : ‘Fais-nous rire, surprends-nous !’", raconte-t-il. Résultat : des heures de délire pur, où il hurlait des phrases absurdes comme "He’s heating up!" ou "The monkey’s on his back!" sans savoir que certaines deviendraient légendaires.

Autre anecdote savoureuse : la cabane d’enregistrement de Midway était si mal isolée que les bruits de la rue de Chicago s’entendaient sur les bandes. "Parfois, on entendait des klaxons ou des gens crier en fond. Mais ça ajoutait au charme !", s’amuse Kitzrow. Une ambiance artisanale qui contraste avec les studios high-tech d’aujourd’hui... et qui explique peut-être pourquoi ses commentaires sonnent si authentiques.

Enfin, saviez-vous que Kitzrow a enregistré plus de 2 000 répliques pour NBA Jam... dont seulement 500 ont été utilisées ? Les autres dorment dans les archives de Midway, peut-être à jamais perdues. Un trésor caché qui, s’il était exhumé, ferait le bonheur des fans.

Aujourd’hui, Tim Kitzrow est un survivant d’une époque révolue – celle où les talents du jeu vidéo étaient traités comme des figurants. Pourtant, chaque fois qu’un "He’s on fire!" retentit dans une cour de récré ou qu’un streamer imite son style survolté, c’est un peu de justice qui lui est rendue. Son histoire rappelle que derrière chaque jeu culte se cachent des hommes et des femmes dont le travail a trop souvent été invisible... et sous-payé. Et si NBA Jam reste un monument du gaming, c’est aussi grâce à lui. Alors la prochaine fois que vous jouez, souvenez-vous : ce "Boomshakalaka!" a coûté 50 dollars de l’heure... mais il est inestimable pour des millions de joueurs.
L'Avis de la rédaction
Par Nakmen
Tim Kitzrow, la voix de NBA Jam, a été payé comme un étudiant en job d’été. 50 dollars de l’heure pour des répliques qui ont marqué une génération. Une injustice qui résonne encore aujourd'hui.
Article rédigé par SkimAI
Révisé et complété par Nakmen

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