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Pokémon s’installe au Musée d’Histoire Naturelle de Londres : entre célébration et crainte des revendeurs
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Le Musée d’Histoire Naturelle de Londres accueillera en janvier 2026 un pop-up shop Pokémon célébrant les 30 ans de la franchise, avec des produits exclusifs comme un doudou Pikachu embrassant le musée. Mais l’ombre des revendeurs, qui avaient déjà ruiné des collaborations précédentes comme celle avec le Van Gogh Museum en 2023, plane déjà sur l’événement. Une réservation gratuite en ligne sera obligatoire pour tenter de limiter les abus.
A retenir :
- Premier pop-up Pokémon dans un musée britannique : Une collaboration inédite entre The Pokémon Company et le Musée d’Histoire Naturelle de Londres, du 26 janvier au 22 mars 2026.
- Un doudou Pikachu "embrassant le musée" parmi les produits exclusifs attendus, aux côtés de vêtements et accessoires inspirés de la biodiversité.
- Système anti-scalpers : Réservations gratuites et obligatoires dès le 1er octobre 2025, mais les fans craignent déjà des contournements comme en 2023 aux Pays-Bas.
- 30 ans de Pokémon : L’événement s’inscrit dans une année anniversaire marquée par la sortie de Pokémon Legends: Z-A et des collaborations culturelles mondiales.
- Précédents alarmants : Au Van Gogh Museum, des revendeurs avaient vidé les stocks en quelques heures, revendant les cartes Pokémon à 10 fois leur prix.
Quand Pikachu rencontre Darwin : une alliance inattendue entre Pokémon et science
Le Musée d’Histoire Naturelle de Londres, temple de la biodiversité et des fossiles préhistoriques, s’apprête à accueillir un invité surprenant : Pikachu. Annoncée officiellement le 12 septembre 2025, cette collaboration avec The Pokémon Company marque un tournant dans l’histoire des pop-up shops dédiés à la franchise. Contrairement aux boutiques éphémères classiques, souvent installées dans des centres commerciaux, ce partenariat mise sur un cadre scientifique pour célébrer les 30 ans de Pokémon (1996–2026).
"Il y a une synergie évidente entre Pokémon et notre musée", explique Adam Farrar, directeur commercial de l’institution, dans une déclaration à Eurogamer. "Tous deux explorons la diversité du vivant, son évolution, et la curiosité qu’elle inspire." Une philosophie qui se retrouvera dans les designs exclusifs des produits, inspirés des collections du musée — des fossiles de dinosaures aux insectes tropicales, en passant par des motifs rappelant les premiers croquis de Charles Darwin.
Parmi les pièces maîtresses, un doudou Pikachu "embrassant le bâtiment" — une référence directe à l’architecture néo-gothique du musée — devrait attirer les collectionneurs. Mais c’est aussi ce type d’objets limités et symboliques qui, par le passé, ont alimenté le marché noir. En 2023, une carte Pokémon "Pikachu au chapeau de Van Gogh", vendue 5€ au Van Gogh Museum d’Amsterdam, s’était retrouvée sur eBay à plus de 200€ en quelques heures.
Le spectre des revendeurs : comment le musée compte-t-il les contrer ?
La question des scalpers (revendeurs opportunistes) hante déjà les discussions des fans. Lors de la collaboration avec le Van Gogh Museum, des centaines de personnes avaient accaparé les stocks sans même visiter l’exposition, revendant ensuite les produits avec des marges de 500 à 1000%. "Certains achetaient 20 T-shirts d’un coup, comme s’ils faisaient leurs courses de Noël", témoignait un employé du musée sous couvert d’anonymat.
Pour éviter un scénario similaire, le musée londonien a mis en place un système de réservation gratuit via son site web, ouvert à partir du 1er octobre 2025. Chaque visiteur devra présenter son billet numérique à l’entrée, avec une limite d’un exemplaire par produit et par personne. "Nous surveillerons aussi les comportements suspects", précise un porte-parole, évoquant des contrôles aléatoires et une liste noire pour les contrevenants.
Pourtant, les experts restent sceptiques. "Les scalpers trouvent toujours des failles", analyse Marie Dupont, spécialiste du marché des goods japonais à l’Université de Kyoto. "Ils utilisent des bots pour réserver des dizaines de créneaux, ou paient des gens pour faire la queue à leur place. Sans vérification d’identité stricte, c’est peine perdue." Un avis partagé par les fans sur Reddit, où certains évoquent déjà des "armées de revendeurs organisés" prêtes à déferler sur Londres.
Pokémon Legends: Z-A et l’année anniversaire : un contexte explosif
Ce pop-up shop s’inscrit dans une année 2026 historique pour la franchise. Après le succès mitigé de Pokémon Écarlate et Violet (2022), critiqué pour ses bugs techniques, The Pokémon Company prépare un retour en force avec Pokémon Legends: Z-A, annoncé pour fin 2025. Ce jeu, qui promet une réinvention des combats et un monde ouvert dynamique, relance l’engouement des fans — et par ricochet, la demande pour les produits dérivés.
"Z-A pourrait être le jeu le plus ambitieux depuis Pokémon GO", estime Julien Morizur, rédacteur en chef de JeuxVideo.com. "Avec son système de 'Terastallisation' repoussé et des mécaniques inédites, il attire même les joueurs qui avaient décroché. Le pop-up shop arrive au bon moment pour surfer sur cette vague."
Mais cette effervescence a un revers : elle attire les prédateurs. En 2021, la collaboration entre Pokémon et McDonald’s (avec des Happy Meal à collectionner) avait viré au cauchemar. Des bagarres avaient éclaté dans des restaurants, et des cartes rares s’étaient vendues jusqu’à 500$ sur eBay. "Les marques sous-estiment toujours l’impact de leurs partenariats", regrette Sophie Leroux, économiste spécialisée dans les marchés de l’occasion. "Elles créent une pénurie artificielle qui alimente la spéculation."
Derrière les peluches : l’enjeu économique des collaborations muséales
Pour les musées, ces partenariats sont une aubaine financière. Le Van Gogh Museum avait enregistré une hausse de 40% de ses ventes pendant la collaboration Pokémon, avec un afflux de visiteurs jeunes (18–35 ans) habituellement peu attirés par l’art classique. "C’est une façon de rajeunir notre public", confirme Adam Farrar, qui espère reproduire ce succès à Londres.
Pourtant, ces opérations ne sont pas sans risques. En 2019, le Louvre avait dû annuler une exposition Nintendo après des protestations des syndicats, jugeant le projet "trop commercial". "Il faut trouver un équilibre", nuance Élodie Richard, conservatrice au Muséum national d’Histoire naturelle de Paris. "Une collaboration doit enrichir le discours scientifique, pas juste servir de vitrine publicitaire."
Du côté de The Pokémon Company, l’enjeu est tout autre : consolider l’image de la marque après des années de critiques sur la qualité des jeux (bugs, graphismes datés). "Pokémon a besoin de se réinventer", explique Kenji Tominaga, analyste chez Nikkei. "Ces partenariats culturels, couplés à des innovations comme Z-A, montrent qu’ils prennent les attentes des fans au sérieux."
2026, année charnière : entre nostalgie et révolution
Avec ses 30 ans, Pokémon entre dans une décennie décisive. La franchise, qui a généré plus de 140 milliards de dollars depuis 1996 (source : Statista), doit faire face à plusieurs défis :
- La concurrence des gacha games (comme Genshin Impact) qui séduisent les jeunes joueurs avec des graphismes next-gen.
- L’usure de la formule : depuis Pokémon Rouge et Bleu, le gameplay reste très similaire, malgré des évolutions marginales.
- La pression des fans pour des innovations radicales, comme un monde ouvert persistant ou des combats en temps réel.
Le pop-up shop de Londres s’inscrit dans cette stratégie de reconquête. En misant sur l’émotion nostalgique (les fans des années 90 sont aujourd’hui des adultes avec un pouvoir d’achat) et en ciblant les nouvelles générations via des designs modernes, Pokémon tente de réunir deux publics. "C’est malin : ils transforment un musée en terrain de jeu intergénérationnel", salue Thomas Rousseau, sociologue des cultures geek.
Reste à savoir si cette opération suffira à effacer les souvenirs des échecs passés — comme les servers saturés de Pokémon GO en 2016 ou les bugs de Écarlate/Violet. Une chose est sûre : entre les revendeurs, les attentes des fans et les enjeux économiques, ce pop-up shop sera bien plus qu’une simple boutique éphémère. Ce sera un test grandeur nature pour l’avenir de Pokémon.
Le pop-up shop Pokémon du Musée d’Histoire Naturelle de Londres incarne à la fois l’audace et les défis d’une franchise à la croisée des chemins. Entre célébration artistique et risque commercial, l’événement promet d’être un laboratoire des tensions modernes du marché des goods : nostalgie vs. spéculation, accessibilité vs. rareté, culture vs. consommation.
Si le musée parvient à contrer les revendeurs — un pari ambitieux —, cette collaboration pourrait devenir un modèle pour les futures opérations. À l’inverse, un nouveau fiasco comme à Amsterdam entacherait durablement l’image de Pokémon, déjà écornée par des années de désillusions techniques.
Une chose est certaine : du 26 janvier au 22 mars 2026, tous les regards seront tournés vers Londres. Pas seulement pour admirer un Pikachu embrassant un musée, mais pour voir si, après 30 ans d’existence, Pokémon peut enfin grandir sans se faire dévorer par ses propres fans.