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Star Wars : quand un fan accuse Disney de plagiat après la sortie de
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Un créateur accuse Disney d’avoir copié son œuvre pour Star Wars: Visions – une affaire qui révèle les tensions entre géants du cinéma et artistes indépendants.
Lorenz Hideyoshi, réalisateur amateur, dénonce des similitudes troublantes entre son court-métrage Dark Jedi: A Star Wars Story (2019) et l’épisode The Bandits of Golak de Star Wars: Visions S3 (2025), produit par le studio indien 88 Pictures. Avec 1,2 million de vues sur YouTube, son œuvre, créée en hommage à la saga, se retrouve au cœur d’une polémique sur les limites entre inspiration et plagiat. Disney, contacté par IGN, n’a toujours pas réagi, laissant planer le doute : négligence créative ou exploitation délibérée des créations fan-made ?
A retenir :
- Dark Jedi vs The Bandits of Golak : des chorégraphies de sabres et des cadrages quasi identiques, selon une comparaison visuelle virale.
- 1,2 million de vues pour le court-métrage de Hideyoshi (2019) – une œuvre non lucrative, aujourd’hui au centre d’un débat sur le droit d’auteur.
- 88 Pictures, studio sous-traitant pour Disney, dans la tourmente : erreur isolée ou pratique courante dans Star Wars: Visions ?
- Silence radio chez Disney et LucasFilm, alors que des précédents (comme The Mandalorian) avaient déjà soulevé des questions similaires.
- Une affaire qui pourrait faire jurisprudence pour les créateurs indépendants, souvent inspirants… mais rarement crédités.
Un duel de sabres… et de droits d’auteur
Tout commence en 2019, quand Lorenz Hideyoshi, passionné de Star Wars depuis l’enfance, publie sur YouTube Dark Jedi: A Star Wars Story, un court-métrage fan-made de 10 minutes. Sans budget, mais avec une ambition claire : rendre hommage à l’univers des Jedi et des Sith à travers une chorégraphie de combat au sabre laser ultra-dynamique. Le résultat ? Un succès inattendu : 1,2 million de vues, des éloges pour la fluidité des mouvements, et une reconnaissance dans la communauté des fans.
Cinq ans plus tard, en 2024, la sortie du teaser pour The Bandits of Golak – un épisode de la saison 3 de Star Wars: Visions (prévue pour 2025) – laisse Hideyoshi sans voix. Les images montrent un duel aux allures étrangement familières : mêmes enchaînements de sabres, mêmes angles de caméra, même rythme dans les déplacements des personnages. Le réalisateur publie alors une comparaison côté à côté sur Instagram, mettant en lumière des similitudes frappantes. Le hasard fait-il bien les choses ?
Pour Hideyoshi, la réponse est non. Dans une interview accordée à Screen Rant, il explique : "Je ne cherche pas à attaquer Disney en justice, mais je veux que les gens sachent d’où vient cette scène. J’ai passé des mois à peaufiner chaque mouvement, et voir ça repris sans aucun crédit… c’est frustrant." D’autant que Star Wars: Visions, série d’anthologie explorant des récits alternatifs, se targue justement de célébrer la créativité des studios partenaires. Une ironie amère pour les artistes indépendants.
Le problème ? Dark Jedi n’est pas une œuvre isolée. Des dizaines de courts-métrages fan-made circulent sur le web, certains atteignant des millions de vues. En 2021, un autre créateur, Andrew Ainsworth, avait déjà accusé The Mandalorian d’avoir repris ses designs de casques de Boba Fett sans mention. À chaque fois, la même question revient : où s’arrête l’hommage, et où commence le vol ?
Star Wars: Visions, un terrain de jeu… sans règles ?
Contrairement aux séries canon comme The Mandalorian ou Ahsoka, où LucasFilm contrôle chaque détail, Star Wars: Visions fonctionne différemment. La série, lancée en 2021, donne carte blanche à des studios du monde entier pour réinterpréter l’univers Star Wars à leur manière. Résultat : des épisodes aux styles visuels radicalement différents, du anime japonais (Science SARU) à l’animation 3D indienne (88 Pictures).
Mais cette liberté a un prix. En 2021, l’épisode The Ninth Jedi (S1) avait déjà suscité des débats pour ses choix narratifs audacieux, certains fans y voyant une réécriture trop libre du lore. Pourtant, personne n’avait crié au plagiat. Cette fois, avec The Bandits of Golak, la ligne rouge semble franchie. 88 Pictures, studio basé à Bangalore et connu pour ses collaborations avec Netflix et Amazon Prime, se retrouve sous le feu des critiques.
Deux hypothèses s’affrontent :
- Une coïncidence malheureuse : les équipes de 88 Pictures auraient, sans le vouloir, reproduit des séquences similaires à celles de Hideyoshi, par pur hasard ou inspiration inconsciente.
- Un emprunt délibéré : le studio (ou Disney) aurait sciemment puisé dans le travail du fan, estimant que son œuvre, non protégée commercialement, était "libre de droits".
Interrogé par Variety, un ancien employé de LucasFilm (souhaitant rester anonyme) confie : "Dans les anthologies comme Visions, les studios externes ont une marge de manœuvre énorme. Mais Disney valide toujours les storyboards finaux. Si la scène de Hideyoshi était effectivement plagiée, c’est que quelqu’un, quelque part, a fermé les yeux."
Le plus troublant ? Dark Jedi est disponible sur YouTube depuis 2019 – une plateforme que les équipes juridiques de Disney scrutent en permanence pour traquer les violations de copyright. Difficile de croire que personne n’ait remarqué le court-métrage… surtout quand on sait que Disney a déjà fait supprimer des centaines de vidéos fan-made pour "atteinte aux droits".
Disney, LucasFilm… et le grand silence
Depuis que l’affaire a éclaté, Disney et LucasFilm gardent un silence de plomb. Aucune déclaration officielle, aucun démenti, aucune reconnaissance. Une attitude qui n’est pas sans rappeler d’autres polémiques, comme celle autour des concepts art de Ralph McQuarrie (désigneur original de Star Wars), dont certains éléments auraient été réutilisés sans crédit dans The Force Awakens.
Pour Julie Ahlin, avocate spécialisée dans le droit d’auteur, contactée par The Verge : "Le cas de Hideyoshi est complexe. Son œuvre est une création dérivée, donc techniquement, Disney pourrait argumenter qu’elle appartient déjà à l’univers Star Wars. Mais moralement, c’est une autre paire de manches. Si les similitudes sont avérées, un arrangement à l’amiable (un crédit, une compensation) serait la moindre des choses."
Du côté des fans, les réactions sont partagées. Certains soutiennent Hideyoshi, voyant là un nouveau symbole de l’exploitation des petits créateurs par les géants du divertissement. D’autres, plus sceptiques, estiment que les ressemblances relèvent davantage de l’inspiration commune que du plagiat pur et simple. Un débat qui divise même les critiques : alors que IGN parle d’un "cas troublant", Collider tempère en rappelant que "les duels de sabres ont toujours eu des codes visuels similaires dans Star Wars".
Ce qui est sûr, c’est que cette affaire arrive à un moment charnière pour Disney. Après les critiques sur la surproduction de contenus Star Wars (avec des séries comme Andor ou The Book of Boba Fett accusées de manquer d’originalité), le géant doit maintenant gérer une crise de confiance avec sa communauté. Les créateurs indépendants, eux, observent avec attention : si Disney s’en sort sans conséquences, qu’est-ce qui les empêchera, demain, de puiser dans leurs œuvres sans sourciller ?
Derrière les sabres, une bataille culturelle
Au-delà du cas Hideyoshi, cette polémique révèle un phénomène plus large : l’appropriation systématique des idées fan-made par l’industrie. Depuis des années, les studios puisent dans les fanfictions, les fan arts et les courts-métrages amateurs pour alimenter leurs franchises. Parfois avec l’accord des créateurs (comme pour Deadpool, inspiré de comics fans), parfois sans.
Dans l’univers Star Wars, la frontière est particulièrement floue. La saga, depuis 1977, s’est construite sur des emprunts culturels (les samouraïs pour les Jedi, les westerns pour Han Solo…). Mais aujourd’hui, avec l’essor des plateformes comme YouTube ou ArtStation, les fans ont les moyens de produire des œuvres professionnelles – et les studios ont tout intérêt à les surveiller.
Pour Hideyoshi, l’enjeu dépasse son propre cas : "Si Disney peut prendre ce qu’elle veut sans même un merci, pourquoi les fans continueraient-ils à créer ? À un moment, la passion a des limites." Une question qui résonne particulièrement fort dans un contexte où les grèves des scénaristes (2023) ont déjà mis en lumière les dérives de l’industrie face à la propriété intellectuelle.
Reste une lueur d’espoir : en 2022, Marvel (aussi propriété de Disney) avait crédité et récompensé un artiste fan après avoir utilisé son design pour un poster officiel. Un précédent qui montre que, parfois, les géants peuvent faire un pas vers les créateurs. Affaire à suivre, donc – surtout si The Bandits of Golak devient, malgré lui, le symbole d’une génération de fans lassés d’être invisibles.
L’affaire Hideyoshi vs Disney n’est pas qu’une simple querelle de sabres lasers. Elle cristallise les tensions d’une époque où les frontières entre création professionnelle et passion amateur s’estompent – sans que les règles du jeu ne suivent. Pour les fans, la question est simple : si Disney s’inspire de leurs œuvres, pourquoi ne pas les associer, ne serait-ce que symboliquement, à ses projets ?
En attendant une éventuelle réaction du géant, une chose est sûre : The Bandits of Golak ne sera plus jamais regardé de la même manière. Et les prochains épisodes de Star Wars: Visions seront scrutés sous un nouvel angle – celui de la créativité… et de ses limites.

