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**Hide and Seek (2005)** : Le thriller psychologique oublié de Robert De Niro aux 5 fins troublantes
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Pourquoi Hide and Seek (2005), ce thriller psychologique avec Robert De Niro et Dakota Fanning, reste-t-il un cas à part dans le cinéma des années 2000 ? Entre succès commercial (122 millions de dollars) et échec critique (15 % sur Rotten Tomatoes), le film de John Polson divise encore. Porté par une interprétation glaçante de Fanning et une structure narrative audacieuse – cinq fins alternatives –, il explore la dualité et les troubles dissociatifs avec des symboles visuels percutants, comme ce dessin aux deux têtes. Un ovni cinématographique, entre héritage de Fight Club et inspiration de Clue, qui mérite une réévaluation.
A retenir :
- Un thriller psychologique méconnu : 122M$ de recettes pour seulement 15 % de critiques positives, un paradoxe du cinéma des années 2000.
- Dakota Fanning, révélation glaçante : À 11 ans, elle incarne une enfant aux troubles dissociatifs, avec un jeu entre fragilité et violence qui marque les esprits.
- 5 fins alternatives : Une rareté pour l’époque, oscillant entre désespoir (hospitalisation, solitude) et un rare espoir (Happy Drawing).
- Inspirations cultes : Mélange de la dualité de Fight Club (1999) et de la multiplicité narrative de Clue (1985), transposé dans un univers enfantin troublant.
- Un symbole visuel fort : Le dessin aux deux têtes, métaphore crue du trouble dissociatif, devient l’emblème du film.
- Réception contrastée : Entre oubli critique et fascination pour son approche psychologique, Hide and Seek reste un film culte pour certains, un échec pour d’autres.
Un succès commercial qui cache un échec critique
Sorti en 2005, Hide and Seek (El escondite en espagnol) s’inscrit dans la veine des thrillers psychologiques qui ont marqué le début des années 2000, aux côtés de chefs-d’œuvre comme The Others (2001) ou The Sixth Sense (1999). Pourtant, contrairement à ces derniers, le film de John Polson n’a pas su convaincre la critique. Avec un budget modeste de 25 millions de dollars, il a rapporté 122 millions au box-office mondial – un ratio impressionnant, mais qui contraste avec une réception désastreuse : seulement 15 % d’avis positifs sur Rotten Tomatoes. Les critiques lui reprochaient un scénario prévisible, des clichés du genre, et une fin jugée trop ambiguë. Pourtant, Hide and Seek possède des atouts qui en font un film bien plus intéressant qu’il n’y paraît.
Le scénario, écrit par Ari Schlossberg, mise sur une atmosphère oppressante et un suspense croissant, mais peine à éviter certains écueils du thriller psychologique. Pourtant, son approche des troubles mentaux, en particulier à travers le personnage d’Emily (interprétée par une Dakota Fanning alors âgée de 11 ans), reste l’un de ses points forts. Le film ose aborder un thème rare pour l’époque : le trouble dissociatif de l’identité, un sujet complexe qui, s’il est parfois malmené par le scénario, donne lieu à des séquences visuellement frappantes.
Dakota Fanning : Une performance glaçante entre innocence et folie
Si Hide and Seek mérite d’être redécouvert aujourd’hui, c’est avant tout grâce à Dakota Fanning. À seulement 11 ans, l’actrice livre une performance d’une maturité déconcertante, oscillant entre une fragilité enfantine et des explosions de violence incontrôlable. Son personnage, Emily, est une jeune fille traumatisée par le suicide de sa mère, qui semble développer une personnalité alternative, Charlie. Fanning parvient à incarner cette dualité avec une justesse rare, notamment dans les scènes où Emily dialogue avec son "ami imaginaire", ou lorsqu’elle bascule soudainement dans une rage aveugle.
Le film utilise des symboles visuels puissants pour illustrer cette fracture interne. Le plus marquant ? Un dessin aux deux têtes, réalisé par Emily, qui devient le fil conducteur de l’intrigue. Ce motif, à la fois naïf et terrifiant, rappelle les jeux de miroirs de Fight Club (1999), mais transposés dans l’univers déstabilisant de l’enfance. Une approche qui, si elle n’est pas toujours subtile, a le mérite d’oser explorer des territoires peu fréquentés par les thrillers grand public de l’époque.
"Je ne jouais pas une enfant folle, mais une enfant qui essayait de comprendre ce qui lui arrivait." — Dakota Fanning, sur son rôle dans Hide and Seek (2005).
Cinq fins pour un même cauchemar : Une structure narrative audacieuse
L’élément le plus original – et le plus discuté – de Hide and Seek reste sans conteste ses cinq fins alternatives. Une rareté pour un thriller des années 2000, qui s’inspire directement de Clue (1985), ce film culte où plusieurs dénouements étaient proposés en fonction des salles de cinéma. Ici, quatre des cinq fins plongent le spectateur dans une spirale sombre :
- L’hospitalisation psychiatrique : Emily est internée, confirmant la gravité de son trouble.
- La solitude pathologique : Son père (Robert De Niro) la retrouve seule, murée dans son mutisme.
- La confirmation du trouble dissociatif : Le dessin aux deux têtes réapparaît, scellant sa dualité.
- La mort tragique : Une fin plus radicale, où Emily succombe à sa folie.
Seul le cinquième dénouement, intitulé Happy Drawing, offre une lueur d’espoir : Emily, apaisée, montre à son père un nouveau dessin – cette fois, sans dualité. Une conclusion qui tranche avec le reste, au point que certains y voient une hésitation scénaristique plutôt qu’une richesse narrative. Pourtant, cette multiplicité des fins renforce l’idée d’un malaise persistant, comme si le film refusait de trancher entre réalité et illusion.
Cette structure rappelle aussi les films à embranchements des années 90, comme Sliding Doors (1998), mais avec une dimension bien plus sombre. Certains critiques ont vu dans ces fins alternatives un manque de courage de la part des scénaristes, incapables de choisir une seule direction. D’autres, au contraire, y ont salué une audace rare, qui force le spectateur à remettre en question ce qu’il vient de voir.
Entre Fight Club et Clue : Les influences d’un thriller hybride
Hide and Seek est un film hybride, qui puise son inspiration dans deux œuvres majeures :
- Fight Club (1999) : Pour son exploration de la dualité et de la fracture identitaire, même si ici, le thème est transposé à travers le prisme de l’enfance.
- Clue (1985) : Pour sa multiplicité des fins, même si l’approche psychologique de Hide and Seek est bien plus sombre.
Le résultat est un mélange inégal mais fascinant. D’un côté, le film souffre de défauts évidents : un rythme parfois lent, des dialogues qui sonnent faux, et une intrigue qui peine à surprendre. De l’autre, il possède une atmosphère unique, renforcée par la bande originale angoissante de John Ottman (compositeur de Usual Suspects et X-Men), et une photographie glaciale qui colle parfaitement au thème.
Un autre point fort ? La relation père-fille entre Robert De Niro (dans un rôle plus discret que d’habitude) et Dakota Fanning. Leur dynamique, entre tendresse et incompréhension, ajoute une couche émotionnelle qui manque souvent aux thrillers du genre. De Niro, bien que moins présent à l’écran, apporte une gravité silencieuse qui contrebalance les excès du scénario.
Pourquoi Hide and Seek divise-t-il autant ?
Alors, Hide and Seek est-il un film sous-côté ou un échec mérité ? La réponse dépend de ce que l’on attend d’un thriller psychologique.
Pour ses détracteurs, c’est un film trop prévisible, qui repose sur des clichés éculés (l’enfant perturbé, la maison isolée, les portes qui grincent) et une fin ambiguë qui frustre plus qu’elle n’intrigue. Certains vont jusqu’à le qualifier de "Fight Club pour ados", une version édulcorée et moins aboutie du chef-d’œuvre de David Fincher.
Pour ses défenseurs, en revanche, c’est un ovni cinématographique qui ose aborder des thèmes complexes (la folie infantile, le deuil, la dissociation) avec une honneteté rare. La performance de Dakota Fanning, les fins alternatives, et l’ambiance oppressante en font un film culte malgré lui, une œuvre qui mérite d’être redécouverte aujourd’hui, à l’ère des thrillers psychologiques formatés.
Un élément souvent oublié ? Le contexte de production. Tourmenté, le tournage a été marqué par des tensions entre le réalisateur et le studio, qui voulait une fin plus "grand public". Les cinq dénouements seraient en partie le résultat de ces désaccords, ce qui expliquerait leur ton inégal. Une anecdote qui ajoute une couche de tragédie à ce film déjà sombre : et si Hide and Seek avait été victime de son propre trouble dissociatif ?
Un héritage contrasté, entre oubli et fascination
Aujourd’hui, Hide and Seek est surtout connu pour trois choses :
- Sa bande-annonce trompeuse, qui le présentait comme un thriller surnaturel (alors qu’il est purement psychologique).
- La performance de Dakota Fanning, souvent citée comme l’une de ses meilleures à cette période.
- Ses fins alternatives, qui en ont fait un sujet de débat parmi les fans de cinéma.
Pourtant, le film reste largement ignoré des rétrospectives sur les thrillers des années 2000. Peut-être parce qu’il ne rentre dans aucune case : trop psychologique pour les amateurs de frissons faciles, trop grand public pour les puristes du genre. Ou peut-être, tout simplement, parce qu’il est trop dérangeant.
Une chose est sûre : Hide and Seek est un film qui ne laisse pas indifférent. Qu’on l’aime ou qu’on le déteste, il reste gravée dans la mémoire, comme ces dessins aux deux têtes qui hantent encore ceux qui l’ont vu. Et dans un paysage cinématographique où les thrillers psychologiques se ressemblent de plus en plus, cette strangeté assumée mérite peut-être une seconde chance.
Hide and Seek n’est pas un chef-d’œuvre. Il n’est même pas un bon thriller au sens classique du terme. Pourtant, il possède cette qualité rare : il dérange. Entre les cris déchirants de Dakota Fanning, ces fins qui refusent de trancher, et ce dessin aux deux têtes qui hante longtemps après le générique, le film de John Polson laisse une empreinte tenace. Peut-être est-ce là, finalement, la marque des œuvres qui comptent – celles qui, malgré leurs défauts, s’accrochent à l’esprit bien après que les lumières se soient rallumées.
À une époque où le cinéma grand public évite soigneusement l’ambiguïté, Hide and Seek ose encore poser des questions sans y répondre. Et ça, c’est bien plus effrayant que n’importe quel jump-scare.

