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Starfield : Pourquoi l’Espace de Bethesda Déçoit (Et Comment le Sauver)
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Un vétéran de Bethesda brise le mythe : Starfield n’est pas le Skyrim des étoiles. Entre planètes répétitives, ennemis humains trop présents et un vide spatial peu engageant, le RPG de Bethesda peine à convaincre. Pourtant, entre les DLC annoncés, les rumeurs de portage sur PS5 et Switch 2, et l’ingéniosité des moddeurs, le jeu a encore une chance de redevenir une aventure interstellaire mémorable.
A retenir :
- Bruce Nesmith (ex-Bethesda, Skyrim, Fallout 3) : « L’espace est ennuyeux par nature » – une critique qui remet en cause l’ambition même de Starfield.
- La génération procédurale crée des « planètes photocopiées », un problème déjà rencontré par No Man’s Sky avant ses corrections majeures.
- Un bestiaire sous-exploité : malgré des designs aliens signés ZeniMax Online, Starfield mise surtout sur des combats contre… des humains.
- Bethesda mise sur des DLC narratifs (comme pour Skyrim) et des rumeurs de portage sur PS5 et Nintendo Switch 2 persistent.
- Les moddeurs sauvent la mise : Starfield Overhaul (environnements) et Alien Menace (factions extraterrestres) parmi les mods les plus téléchargés en 2025.
« L’espace n’est pas Bordeciel » : quand un vétéran de Bethesda brise l’illusion
Imaginez un instant : vous quittez les forêts enneigées de Bordeciel ou les déserts irradiés de Fallout pour vous élancer vers les étoiles. Le rêve de Starfield était justement celui-là – transposer la magie des mondes ouverts de Bethesda dans un cadre interstellaire. Pourtant, selon Bruce Nesmith, designer ayant travaillé sur Oblivion, Fallout 3 et Skyrim avant de quitter le studio en 2021, la réalité est bien moins glamour : « L’espace est intrinsèquement ennuyeux ».
Une déclaration choc, surtout venant d’un homme qui a contribué à façonner l’univers du jeu, en collaboration avec la NASA pour intégrer des données astronomiques précises. Mais Nesmith enfonce le clou : « Le vide sidéral, par définition, n’offre pas l’excitation d’un monde ouvert comme Skyrim ou Fallout. » Pire encore, il souligne un paradoxe cruel : « Si un autre studio avait sorti Starfield, la réception aurait été différente. » Autrement dit, le poids des attentes liées à l’héritage de Bethesda a joué contre le jeu.
Pourtant, l’ambition était là. Starfield promettait plus de 1 000 planètes à explorer, chacune générée procéduralement pour offrir une expérience unique. Mais c’est précisément ce système qui pose problème, comme nous allons le voir.
Génération procédurale : quand l’infini devient monotone
Sur le papier, la génération procédurale est une solution élégante : elle permet de créer un univers vaste sans que les développeurs aient à concevoir chaque détail manuellement. Dans les faits, pour Starfield, le résultat est bien différent. Nesmith résume le problème en un mot : « samey », un anglicisme popularisé par les joueurs pour décrire des environnements répétitifs, dépourvus de personnalité.
Le phénomène n’est pas nouveau. No Man’s Sky, sorti en 2016, avait essuyé les mêmes critiques avant que des mises à jour massives ne viennent diversifier ses biomes et ses mécaniques. Hello Games, le studio derrière le jeu, avait mis près de cinq ans à corriger ses erreurs. Starfield, lui, n’a pas encore bénéficié d’une telle refonte. Résultat : les joueurs atterrissent sur des planètes qui, malgré leurs noms exotiques, se ressemblent étrangement. Une montagne ici, un désert là, quelques rochers dispersés… et l’impression tenace d’avoir déjà vu ce paysage dix fois auparavant.
Pire encore, cette répétition s’étend aux quêtes et aux interactions. Les colonies humaines, par exemple, suivent souvent le même schéma : une poignée de PNJ interchangeables, des dialogues génériques, et des objectifs qui se répètent à l’infini. Un comble pour un jeu qui se veut une odyssée spatiale.
Nesmith pointe aussi un autre écueil : l’absence de points de repère mémorables. Dans Skyrim, qui peut oublier la première fois où l’on aperçoit Blanc-Etang ou les ruines de Markarth ? Dans Starfield, les planètes manquent cruellement de cette signature visuelle qui les rendrait inoubliables.
Des ennemis humains à répétition : le gaspillage d’un bestiaire alien
Autre critique majeure de Nesmith : le manque de diversité ennemie. Dans un univers où l’on pourrait s’attendre à affronter des créatures extraterrestres terrifiantes ou des factions aliens complexes, Starfield se contente trop souvent de… recycler des humains. Pirates, mercenaires, soldats de la UC (United Colonies) : les combats se résument bien souvent à des échanges de tirs entre bipèdes en combinaisons spatiales.
Pourtant, les ressources étaient là. Le studio ZeniMax Online, connu pour son travail sur The Elder Scrolls Online, avait conçu des créatures aliens pour Starfield. Certaines, comme les Ashta (des prédateurs ressemblant à des insectes géants) ou les Crimson Fleet (une faction de pirates mutés), auraient pu offrir des affrontements bien plus variés. Mais dans les faits, ces ennemis restent marginaux. Une occasion manquée, surtout quand on compare Starfield à des titres comme Mass Effect (avec ses Reapers, Krogan et Geth) ou Destiny 2 (et ses Fallen, Hive et Vex).
Nesmith regrette particulièrement ce choix : « Nous avions les outils pour créer un bestiaire riche, mais le jeu se concentre trop sur des conflits humains classiques. » Un parti pris d’autant plus surprenant que Bethesda a toujours excellé dans la création de créatures iconiques, des Dwemers de Morrowind aux Deathclaws de Fallout.
Certains joueurs ont d’ailleurs relevé un détail ironique : dans Starfield, les aliens les plus dangereux… sont souvent des humains modifiés (comme les Ecliptics, une secte fanatique). Une approche qui, si elle peut être intéressante narrativement, limite considérablement la variété des combats.
Derrière les étoiles : les coulisses d’un développement sous pression
Pour comprendre pourquoi Starfield peine à tenir ses promesses, il faut remonter à son développement. Selon des sources internes (rapportées par Bloomberg en 2022), le jeu a été marqué par :
- Un changement de moteur : Bethesda a dû adapter son Creation Engine (utilisé pour Skyrim et Fallout 4) pour gérer l’échelle spatiale, une opération complexe qui a pris du temps.
- Des retards à répétition : initialement prévu pour 2021, le jeu a été repoussé à novembre 2023, puis à septembre 2023, forçant les équipes à accélérer certains aspects.
- Une ambition démesurée : avec plus de 1 000 planètes, des systèmes de voyage spatial, et un système de construction de vaisseaux, les développeurs ont dû faire des compromis.
Nesmith confirme : « Nous voulions tout faire. Un Skyrim dans l’espace, avec des mécaniques de simulation, des combats spatiaux, et une narration profonde. Mais à un moment, il faut choisir. » Résultat, certains éléments, comme la génération procédurale ou la diversité ennemie, ont été sacrifiés pour livrer le jeu à temps.
Un autre détail révélateur : Bethesda a sous-traité une partie du design des planètes à des studios externes, ce qui a pu contribuer à leur manque de cohérence. Une pratique courante dans l’industrie, mais qui, combinée à la pression des délais, explique pourquoi certaines zones semblent bâclées.
DLC, modding et portages : Starfield peut-il se racheter ?
Malgré les critiques, Bethesda ne compte pas abandonner Starfield. Le studio a confirmé le développement de DLC narratifs, une stratégie qui a déjà fait ses preuves avec Skyrim (dont les extensions Dragonborn et Dawnguard avaient relancé l’intérêt des joueurs) et Fallout 4 (Far Harbor, Nuka-World).
Les rumeurs vont même plus loin :
- Un portage sur PlayStation 5 : après des années d’exclusivité Xbox/PC, Bethesda (détenu par Microsoft) envisage enfin une version PS5, peut-être dès 2025.
- Une adaptation pour la Nintendo Switch 2 : des fuites suggèrent que le jeu pourrait être optimisé pour la prochaine console hybride de Nintendo, grâce à sa puissance accrue.
- Un mode "New Game+" : demandé par les fans, il permettrait de conserver son équipement et ses compétences lors d’une nouvelle partie.
Mais le vrai sauveur de Starfield, c’est peut-être… la communauté. Comme pour tous les jeux Bethesda, les moddeurs se sont emparés du titre pour corriger ses défauts. En 2025, les mods les plus populaires sur Nexus Mods incluent :
- Starfield Overhaul : retravaille entièrement la génération procédurale pour rendre les planètes plus variées.
- Alien Menace : ajoute des factions extraterrestres hostiles, avec de nouveaux types d’ennemis et des quêtes dédiées.
- True Exploration : supprime les marqueurs de quête pour une exploration plus immersive (et difficile).
- Ships of the Galaxy : introduit des centaines de nouveaux designs de vaisseaux, inspirés de la science-fiction classique.
Ces initiatives prouvent une chose : malgré ses défauts, Starfield a un potentiel inachevé. Et si Bethesda écoutait ses fans (et ses anciens employés), le jeu pourrait encore devenir la grande aventure spatiale promise.
Et si Starfield avait tout simplement… trop promis ?
En 2018, lors de son annonce, Starfield était présenté comme « le jeu que Bethesda a toujours voulu faire ». Six ans plus tard, force est de constater que la réalité est plus nuancée. Mais est-ce vraiment surprenant ?
Comme le souligne Jason Schreier (journaliste chez Bloomberg), « Bethesda a toujours eu du mal avec les nouveaux IP. Fallout 76 en est la preuve. Leurs forces résident dans l’itération, pas l’innovation. » Starfield souffrirait donc du même syndrome : un mélange d’ambition démesurée et de recettes éprouvées qui ne fonctionnent pas toujours dans un nouveau cadre.
Pourtant, le jeu a aussi ses défenseurs. Todd Howard, directeur de Bethesda, a rappelé que Skyrim avait lui aussi été critiqué à sa sortie (notamment pour ses bugs et son système de combat) avant de devenir un classique. « Les grands jeux évoluent avec le temps, » a-t-il déclaré dans une interview à IGN. Reste à voir si Starfield suivra la même trajectoire.
En attendant, une chose est sûre : entre les DLC à venir, les portages potentiels, et l’ingéniosité des moddeurs, l’aventure de Starfield est loin d’être terminée. Peut-être qu’un jour, l’espace de Bethesda cessera d’être ennuyeux… pour devenir légendaire.

